[A] Tu veux commencer la philo ?

Note : 7

le 04.08.2007 par SoO-Krate

29 réponses / Dernière par thekiller009 le 13.12.2007, 20h09

Etat d'esprit / psychologie / dev perso / vie intérieure.
Un forum pour celles et ceux qui s'intéressent au dev perso, à l'équilibre intérieur, à la psychologie. Surmonter ses blocages, ses croyances limitantes, nourrir et développer ses forces, etc.
Mr White a écrit :
je n'ai lu que tres peu d'ouvrage philosophique

Ce qui fait que tu devrais peut être t'abstenir de poster ici non? Ta comparaison n'a pas de sens.
Peut-être.

Mais je ne partage pas ce point de vue. Merci de ne pas réduire mon message à cette phrase.

D'autre part la quantitée ne fait pas la qualitée.
Mister P a écrit :Je conseillerais pour ma part de faire un tour d'horizon des notions abordées en philo avec un bon manuel de terminale L. Pour chaque notion, il y a un cours sur une ou deux pages puis des extraits des grands penseurs.
Pas d'accord. Pour faire de la philo il faut y accorder du temps. Lire quelques pages sur une notion nous fait croire qu'on a tout compris, mais cela nécéssite un professeur. Quand on voudra aller plus loin il devra corriger tout ce qui était inexact/trop imprécis. le risque est de partir du principe que le manuel a raison, se faire un genre de cadre mental général, puis tout voir à partir de là. Cela revient à avoir des préjugés sur tout ce qu'on lira.

- On a d'emblée de multiples points de vue sur une question donnée
Et on a l'impression qu'il faut choisir, que tous ces auteurs se disputent, et qu'au fond on dire ce qu'on veut sur une notion puisque personne n'est d'accord. En réalité c'est beaucoup plus subtil que ça. C'est pour cela qu'on ne dit plus jamais (normalement) qu'une dissertation est thèse/antithèse/synthèse. Cela reviendrait à dire une chose puis son contraire, enfin à raccorder comme on peut deux choses qui se repoussent absolument. Une dissertation (je rappelle que la dissertation est la version écrite de la pensée structurée, de la logique à l'occidentale telle que nous l'on léguée les Grecs) est une progression, on entre de plus en plus dans la finesse et la subtilité des concepts, mais en aucun cas la deuxième partie n'annule la première, et la troisième ne reprend aucune des deux autres sans ajouter quelque chose.

- Je pense que c'est un peu audacieux de vouloir commencer la philo directement par les oeuvres
- On pourra commencer l'étude des oeuvres selon ses goûts et après avoir acquis le vocabulaire de base
Ce qui est audacieux c'est de penser retrouver la pensée exacte de l'auteur à partir de résumés. Bien au contraire le plus efficace est de se battre avec les oeuvres. D'autant plus que certaines ne sont pas si difficiles que ça à saisir. A ce propos attention au piège: souvent les plus simples à saisir sont celles qui paraissent compliquées. Par exemple Kant fait de très longues phrases, à la première lecture on ne comprend rien. En fait il y a tout chez Kant, et une fois qu'on a "décrypté" la grammaire on peut saisir l'idée. Chez Nieztsche, ou même chez Descartes, le texte est simple...mais chaque mot compte, il y a même certaines choses à déduire soi-même...l'effort personnel, les capacités de rélexion et la culture philosophique du lecteur sont bien plus sollicités que chez Kant ou Hegel).
Pour revenir à ce que je disais (désolé), il vaut donc mieux lire les oeuvres d'abord. Lire vraiment: s'arrêter dès qu'on ne saisit pas quelque chose, réfléchir, relire, ... Si vraiment quelque chose est obscur, passer. Plus loin dans le texte il y a de fortes chances pour que la notion soit expliquée différemment ou résumée (mais pour comprendre le résumé il faut déjà avoir cogité). Une fois que ce travail a été effectué, lire des commentaires (et non pas des résumés) du type "Que sais-je" - ou plus étendu, ça ne peut être que mieux - permet de confirmer ce que l'on avait compris, et souvent d'intégrer les notions dans un cadre plus général, d'extraire de l'oeuvre les grandes lignes de forces qui la tiennent, ce qu'il est parfois difficile de faire seul.





Voilà mon point de vue. Lire des résumés, c'est bien pour des élèves qui veulent empêcher le bateau de couler avant un examen. Ici les gens ne sont pour la plupart pas des élèves, ils viennent pour comprendre vraiment, exactement les choses. Je leur donne la méthode "académique", qui a fait ses preuves (pour moi aussi, bien évidemment), qui se résume en deux points: pour trouver la pensée de l'auteur, lire l'auteur ; pour saisir la pensée de l'auteur, développer sa culture et sa réflexion personnelle.
    Notes et commentaires reçus par ce post :
  • [+4] Constructif par Rudy's
En fait les pistes que je donne ont très bien marché pour moi. Mais je suis peut-être passé trop vite sur les détails :
Pour faire de la philo il faut y accorder du temps
Complètement d'accord : le manuel m'a juste servi de point de départ. Le "cours" n'est pas là pour nous "faire comprendre" mais plutôt pour mettre en lumière les différentes problématiques liées à une notion. J'espère que tu seras d'accord avec moi sur ce point : sans problématique, sans défi intellectuel, pas de philo.
On a l'impression qu'il faut choisir
C'est juste une impression alors... Au contraire le manuel est fait de telle sorte que le même problème soit éclairé de manière complémentaire par plusieurs auteurs. En tout cas j'ai la même vision que toi de la dissertation.
Il vaut donc mieux lire les oeuvres d'abord
Bon là je ne suis pas d'accord. Mais ça n'engage que moi, je dis ce qui a marché pour moi, après chacun voit.

Néanmoins, il me semble difficile pour un adolescent de saisir - même avec la meilleure volonté du monde - la pensée d'un grand penseur dans les moindres détails. La complexité de notre compréhension s'accroît avec le temps, la lâcher-prise, le "fouinage ailleurs" (je pense).

Imagine que tu veuilles expliquer le fonctionnement d'un moteur à un lycéen.

Mon approche serait de décomposer le système en éléments simples en supposant leur fonctionnement connu. Cylindres, cardans, bielle... Et comment ces sous-systèmes interagissent. Ensuite, quand il aura fait un peu de chimie, je parlerais de la stoechiométrie de la réaction, quand il aura fait de la physique des matériaux, de l'usure...

Mais en fait je crois que tu penses la même chose sauf que tu as cru que je valorisais les résumés. Ce qui n'est absolument pas la cas. Le manuel est là pour dégrossir, c'est tout, les oeuvres sont incontournables.
C'est pour cela qu'on ne dit plus jamais (normalement) qu'une dissertation est thèse/antithèse/synthèse
La dialectique abolie ? Je dois en avertir au plus tôt mon hégélienne de prof de philo, je l'imagine déjà saisite d'effroi ! Si les bases élémentaires d'une réflexion philosophique ne son plus enseignées, car si mal comprises, guère étonnant que le niveau soit abyssal.

Pour info thèse/antithèse/synthèse ne signifie pas blanc/noir/gris ou Oui/Non/Peut-être. On présente une première thèse (pertinente !) puis une seconde tout aussi intéressante sachant que les deux ne sont pas compatibles (ce qui ne signifie pas contraire !), et on cherche à concilier les deux en formulant une troisième qui lève l'ambiguité et conserve l'intérêt hermeneutique (=interprétatif/explicatif) des deux premières. C'est plutôt du Jaune/Rouge/Orange. La synthèse englobe et dépasse la confrontation initiale.

Exemple archi-connu (et simplifié ici) : pendant plusieurs siècles, de Platon jusqu'à Kant, deux grandes théories de la connaissance ce sont affrontées : le rationalisme (Platon, Descartes, Malebranche,...) affirmant que toute connaissance vient de la raison et d'idées innées (offertes par notre chère Créateur) et l'emprisme (Epicure, Locke, Hume,...) affirmant que toute connaissance dérive de l'expérience (l'esprit humain est une cire vierge sur laquelle s'imprime passivement des infos). Incompatible. Jusqu'au jour où advient Kant, qui mit fin à la stérile oppposition (oui, oui, des questions philosophiques ont reçu des réponses définitives) : il existe un sujet transcendental connaissant à travers "des filtres", les structures a priori de l'entendement et de la sensibilité. En décrypté, cela donne : les hommes apprennent en interrogant la réalite en soi (expérimentation) suivant des formalisations/lois de la raison communes à tous (notion d'espace, de temps, de causalité,...) et obtiennent ainsi une certaine représentation, ou réalité phénoménale.

Conséquences : Sans raison analytique impossible de traiter les données, et sans données pas de résultats. Impossible aussi de saisir immédiatemment la réalité, que cela soit en refesant le monde enfermé dans un cabinet de travail pendant des heures ou en regardant le dit monde tourné pendant autant de temps. Le savoir se construit par la théorie et la pratique, l'une éclairant l'autre qui la fait avancer en retour. La connaissance n'est pas un don génial tombé du Ciel ou un simple produit du sens de l'observation. Une évidence aujourd'hui, mais pas pour les hommes nées avant le 18e. La théorie kantienne ouvrit bien sûr d'autres débats centenaires, notamment celui de savoir si la réalité en soi existe (=indépendamment de l'esprit/objectivement), cf Schopenhauer qui répondit non...

Je n'ai parlé de tout cela qu'à titre d'exemple, l'histoire des idées (voire l'Histoire tout court) est pleine d'autres mouvements dialectiques. Tout ce mini-hors sujet pour dire qu'une grande part de la philosophie allemande est peu compréhensible si on ne maîtrise pas ce mode de raisonnement. C'est une hérésie de ne pas l'enseigner. Comme disait l'am Kanti "on n'apprend pas la philosophie, on apprend qu'à philosopher". Or avant de se gaver du vocabulaire de la langue philosophique, il faut en maîtriser la grammaire. La logique formelle, la dialectique, sont des bases. Quiconque veut piger un raisonnement juste, le discerner d'un faux, être capable de déceler les réthoriques creuses et ne pas se laisser embobiner par des paroles spécieuses doit les avoir. Quant à lire directement les auteurs rien de mieux, encore faut-il ne pas commencer par Heidegger, Nietzche, ou Marx...
La dialectique abolie ? Je dois en avertir au plus tôt mon hégélienne de prof de philo, je l'imagine déjà saisite d'effroi !
Je me suis peut-être mal exprimé. Je ne voulais pas dire qu'il ne fallait plus le faire, mais plus le dire. J'entends par là qu'un public non averti comprends noir/blanc/gris (je dis quelque chose de faux que je démonte avant d'asséner la vérité). Après, je suis également contre l'abolition de la dialectique :lol: . Simplement j'avoue que j'aime mieux la façon d'expliquer de mes profs de philo: une dissertation est une sorte de mouvement ascendant composé de trois moments, chacun étant un "bout de vérité éternelle", le troisième apporte une réponse à la question (réponse illusoire bien sûr, mais on doit faire une dissertation de 10 pages, pas un livre...).

Pour ceux qui veulent commencer la philo (ou qui passent des concours et veulent être efficaces), un de mes prof vient de me conseiller la collection gf corpus, recueil de textes commentés, classés par notion.
Exemples:
http://www4.fnac.com/Shelf/article.aspx ... Nu=11&Fr=0
http://www4.fnac.com/Shelf/article.aspx ... Nu=19&Fr=0
Ou bien la collection prismes (classés par auteur du coup):
http://sed.hachette-education.com/sites ... &x=68&y=14

Et bien sûr (par auteur ou par notion) les Que-Sais-je? sont très souvent bons.

Sans oublier de lire les textes originaux (avantage de gf corpus et de prismes, ils contiennent des extraits.
Je répondrai par un texte intéressant de Sénéque la suite de mon précèdent post sur l'emploi du temps voici la lettre II :

Des voyages et de la lecture. :
1. Ce que tu m’écris et ce que j’apprends me fait bien espérer de toi. Tu ne cours pas çà et là, et ne te jettes pas dans l’agitation des déplacements. Cette mobilité est d’un esprit malade. Le premier signe, selon moi, d’une âme bien réglée, est de se figer, de séjourner avec soi.
2. Or prends-y garde : la lecture d’une foule d’auteurs et d’ouvrages de tout genre pourrait tenir du caprice et de l’inconstance. Fais un choix d’écrivains pour t’y arrêter et te nourrir de leur génie, si tu veux y puiser des souvenirs qui te soient fidèles. C’est n’être nulle part que d’être partout. Ceux dont la vie se passe à voyager finissent par avoir des milliers d’hôtes et pas un ami. Même chose arrive nécessairement à qui néglige de lier commerce avec un auteur favori pour jeter en courant un coup d’œil rapide sur tous à la fois.
3. La nourriture ne profite pas, ne s’assimile pas au corps, si elle est rejetée aussitôt que prise. Rien n’entrave une guérison comme de changer sans cesse de remèdes ; on n’arrive point à cicatriser une plaie où les appareils ne sont qu’essayés ; on ne fortifie pas un arbuste par de fréquentes transplantations. Il n’est chose si utile qui puisse l’être en passant. La multitude des livres dissipe l’esprit. Ainsi, ne pouvant lire tous ceux que tu aurais, c’est assez d’avoir ceux que tu peux lire.
4. « Mais j’aime à feuilleter tantôt l’un, tantôt l’autre. » C’est le fait d’un estomac affadi, de ne goûter qu’un peu de tout : ces aliments divers et qui se combattent l’encrassent ; ils ne nourrissent point. Lis donc habituellement les livres les plus estimés ; et si parfois tu en prends d’autres, comme distraction, par fantaisie, reviens vite aux premiers. Fais chaque jour provision de quelque arme contre la pauvreté, contre la mort, contre tous les autres fléaux ; et de plusieurs pages parcourues, choisis une pensée pour la bien digérer ce jour-là.
5. C’est aussi ce que je fais : dans la foule des choses que j’ai lues, je m’empare d’un trait unique. Voici mon butin d’aujourd’hui, c’est chez Épicure que je l’ai trouvé ; car j’ai coutume aussi de mettre le pied dans le camp ennemi, non comme transfuge, mais comme éclaireur :
6. « La belle chose, s’écrie-t-il, que le contentement dans la pauvreté ! » Mais il n’y a plus pauvreté, s’il y a contentement. Ce n’est point d’avoir peu, c’est de désirer plus, qu’on est pauvre. Qu’importe combien cet homme a dans ses coffres, combien dans ses greniers, ce qu’il engraisse de troupeaux, ce qu’il touche d’intérêts, s’il dévore en espoir le bien d’autrui, s’il suppute non ce qu’il a acquis, mais ce qu’il voudrait acquérir ! « Quelle est la mesure de la richesse ? » diras-tu. D’abord le nécessaire, ensuite ce dont on se contente.
Très intéressant. En plus, c'est un hasard mais ce matin même mon prof nous dit: "choisissez-vous 2 ou 3 auteurs d'envergure que vous maîtriserez vraiment". Bien sûr c'est dans l'optique concours, Sénèque je ne crois pas (il voulait l'ENS, Sénèque?), mais tout de même.
Il est vrai qu'avec 2-3 auteurs on peut répondre à quasiment n'importe quel sujet. Bien sûr ça ne dispense pas d'une connaissance des autres auteurs, mais plus dans l'optique de les comparer à nos auteurs de référence.
Pour info, mon prof conseille de choisir ces 2-3 parmi: Platon, Aristote, Descartes, Leibniz, Kant, Husserl, Nietzsche. La liste n'est pas exhaustive je pense (Heidegger? Je ne connais pas assez, j'ai lu quelque petites choses mais ce n'est décidément pas encore de mon niveau).
Cyd07 a écrit :La liste n'est pas exhaustive je pense (Heidegger? Je ne connais pas assez, j'ai lu quelque petites choses mais ce n'est décidément pas encore de mon niveau).
Je me demande qui comprend Heidegger. J'ai lu "achèvement de la métaphysique et poésie", je n'ai pas compris. J'ai lu des commentaires, chacun interprétait différemment. Alors j'ai relu, et je n'ai pas mieux compris. Toute sa distinction entre l'être et l'étant ne mène pas à grand chose. Quant à Nietzsche, il le rend encore plus obscur. Recemment, j'ai conseillé à un ami voulant se lancer dans la philo trois ouvrages : La République de Platon, Le Prince de Machiavel, et le Discours de la méthode de Descartes. C'est assez court (1 mois de lecture/relecture à un rythme lent) et sans jargon. Avec cela on a le minimum vital en philosophie politique et logique. Ce qui compte avant d'entamer un nouvel auteur, c'est de savoir à peu prêt quellles idées il reprend de qui et contre quelles idées de qui. Rien de mieux que les fiches de lecture.
La République de Platon, Le Prince de Machiavel, et le Discours de la méthode de Descartes
Assez long quand même La république. J'avoue je ne l'ai jamais lue en entier (oui, évidemment j'ai lu l'allégorie de la caverne, mais à vrai dire pas beaucoup plus).

Discours de la méthode, oui bien sûr, quoique je trouve certains points plus clairs dans les méditations métaphysiques (notamment la preuve de l'existence de Dieu, dans le DM je ne saisis pas, dans les MM si).

Pour Platon j'ai tendance à conseiller le Phèdre, ouvrage peu connu mais intéressant car vraiment à pat. C'est probablement ce que Platon a fait de plus littéraire, c'est un des seuls livres de philo qui m'a vraiment fait ressentir quelque chose (avec le grandiose Ainsi parlait Zarathoustra de Nieztsche). De plus Platon reprend une grosse partie de son ontologie fondamentale (3 parties de l'âme, ...). Bref un ouvrage peu commun, une autre facette de Platon, qui montre vraiment son talent profond d'écrivain.
    Notes et commentaires reçus par ce post :
  • [+1] Constructif par Boubou
http://fr.wikipedia.org/wiki/Portail:Philosophie

http://fr.wikipedia.org/wiki/Philosophie

Je débute, et compte lire le second lien, pour mieux m'y retrouver.

En parallèle (enfin après ou avant, vu qu'aucun des deux n'est long à lire), vu que je l'ai sous la main, je pense lire le livre de Luc Ferry. Je sais pas ce que ça vaut.

C'est pas forcément très poussé, c'est juste pour avoir une vision globale et cerné les auteurs / domaines que je lirais plus sérieusement.



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