Re: Cyrano de Bergerac, l'AFC à la pointe de l'épée
Posté : 29.06.12
Je suis mitigé, Terrigan. Je vais faire un peu l'avocat de Cyrano, puisque personne n'a voulu défendre autre chose que son panache ou le style de l’œuvre. Moi, c'est pour le personnage-même que je veux m'engager... Mais je lui assènerai tout de même quelques coups à la fin. 
Je pense que notre époque a perdu une capacité "d’enivrement" que possédaient encore les anciens. Dans notre époque désabusée, plus de chevaliers prêt à mourir dans un duel à cause d'une baffe, ou pour une noble cause.
Ce qui est beau chez Cyrano, c'est cette capacité à engager toute son âme et à risquer mille périls pour préserver l'image qu'il a de lui-même, et pour suivre ses propres valeurs. Il se sait être un prince, et il est prêt à affronter le monde entier pour préserver son idéal personnel.
Il ne se croit pas capable de séduire la fille, et tout en s'abandonnant complètement à son élan du cœur, dans un désespoir fou, il se sacrifie tout de même pour son concurrent. Pas par faiblesse; par magnanimité. Pourquoi il ne "tente pas son coup", en avouant son amour? Toujours par honneur: il ne peut souffrir, en tant que Prince d'âme, d'être ridiculisé.
Certes, il peut paraître ridicule, mais tel est la nature du dramatique, du pathétique, de toujours être à un doigt du burlesque.
Et c'est ce même burlesque qui fait la grandeur des héros, de ceux qui refusent de balancer un nom sous la torture, même celui d'une personne haïe, parce que ce serait s'abaisser à l'indignité, perdre toute valeur à ses propres yeux. Et le héros meurt heureux, grand d'avoir maîtrisé la mort, la souffrance et la peur, et lance un regard victorieux et moqueur au bourreau, qui est humilié par tant de noblesse... Enfin, vous m'avez compris (sérieux)
): ces héros ne sont pas des AFC, qui, eux sont guidés par la faiblesse et la peur!
Cependant, et c'est là que je rejoins Terrigan, il existe de nombreux héros qui ont cette force morale de faire plier le monde plutôt que de s'y plier, et qui cependant ne peuvent même pas éveiller le doute d'Afcisme ou pas, tellement leur force est évidente, et je les préfère largement à des Cyrano et à des Cid. Mon auteur préféré, Joseph Kessel, ne consacre sa plume qu'à de tels hommes, et il parle d'expérience, je vous conseille notamment le très beau et épique Les cavaliers, ou, plus connu, La condition humaine de Malraux, et enfin, l'histoire de Don Juan, qui ne cesse de défier les Cieux dans une exigence de liberté entière, et en mourra, puni pour ses blasphèmes...
Tous ces livres démentent l'avis de LuxLisbon selon lequel seuls les losers émeuvent, enfin en tout cas pour moi
Pourquoi? Parce que le plus orgueilleux, le plus fier, le plus courageux des héros possède ses faiblesses humaines, et j'en suis arrivé à un stade d'exigence où je ne suis ému que par les faiblesses des "forts" et ne ressens que mépris pour les "gentil loser antihéros" qui restent dans leur marasme de médiocrité et se complaisent dans leur collection de défauts. Je dirais même que je suis ému par l’héroïsme et la soif d'absolu qui l'accompagne, alors que c'est pas le truc émouvant d'habitude.
My 2 cents...

Je pense que notre époque a perdu une capacité "d’enivrement" que possédaient encore les anciens. Dans notre époque désabusée, plus de chevaliers prêt à mourir dans un duel à cause d'une baffe, ou pour une noble cause.
Ce qui est beau chez Cyrano, c'est cette capacité à engager toute son âme et à risquer mille périls pour préserver l'image qu'il a de lui-même, et pour suivre ses propres valeurs. Il se sait être un prince, et il est prêt à affronter le monde entier pour préserver son idéal personnel.
Il ne se croit pas capable de séduire la fille, et tout en s'abandonnant complètement à son élan du cœur, dans un désespoir fou, il se sacrifie tout de même pour son concurrent. Pas par faiblesse; par magnanimité. Pourquoi il ne "tente pas son coup", en avouant son amour? Toujours par honneur: il ne peut souffrir, en tant que Prince d'âme, d'être ridiculisé.
Certes, il peut paraître ridicule, mais tel est la nature du dramatique, du pathétique, de toujours être à un doigt du burlesque.
Et c'est ce même burlesque qui fait la grandeur des héros, de ceux qui refusent de balancer un nom sous la torture, même celui d'une personne haïe, parce que ce serait s'abaisser à l'indignité, perdre toute valeur à ses propres yeux. Et le héros meurt heureux, grand d'avoir maîtrisé la mort, la souffrance et la peur, et lance un regard victorieux et moqueur au bourreau, qui est humilié par tant de noblesse... Enfin, vous m'avez compris (sérieux)

Cependant, et c'est là que je rejoins Terrigan, il existe de nombreux héros qui ont cette force morale de faire plier le monde plutôt que de s'y plier, et qui cependant ne peuvent même pas éveiller le doute d'Afcisme ou pas, tellement leur force est évidente, et je les préfère largement à des Cyrano et à des Cid. Mon auteur préféré, Joseph Kessel, ne consacre sa plume qu'à de tels hommes, et il parle d'expérience, je vous conseille notamment le très beau et épique Les cavaliers, ou, plus connu, La condition humaine de Malraux, et enfin, l'histoire de Don Juan, qui ne cesse de défier les Cieux dans une exigence de liberté entière, et en mourra, puni pour ses blasphèmes...
Tous ces livres démentent l'avis de LuxLisbon selon lequel seuls les losers émeuvent, enfin en tout cas pour moi

My 2 cents...
