De nouvelles personnes arrivent dans mon auberge. Un mec aux allures de beau gosse, une blonde mignonne et une brune au physique lambda mais qui s’habille bien. C’est jeudi soir, tout le monde est en effervescence, moi pas. Les lunettes sur le nez, vêtu d’une polaire au sex-appeal ravageur, les cheveux en bataille, l’ordinateur sur les genoux, calé dans un canapé, je fouille le web à la recherche de formations qui pourraient m’intéresser. Pas la tête à sortir, et puis mon soir de sortie c’est vendredi soir. Ca boit, ça rit, ça se drogue, ça essaye peut-être même de se pécho, c’est beau la jeunesse.
L’anecdote inutile : le lendemain, une copine, J. m’annonce qu’elle s’est pécho avec une autre pote, Lys, dans les toilettes. Pour reprendre ses termes il y avait une « tension sexuelle libidineuse lesbienne ».
Le lendemain rebelote, même heure, même endroit, même polaire. Les autres se sont réunis sur la terrasse intérieure pour fumer. Je suis le seul rescapé du marketing de l’industrie du tabac, évidemment. Je me décide finalement à les rejoindre. Quatre ou cinq personnes de présentes, dont le roumain beau gosse et la fille au physique lambda que je vais plutôt appeler Espiègle, les autres font partie de mes potes permanents, mes mates, mes buddies, mes biatchs, ma famille. Je m’assois, j’écoute. Je ne me souviens plus des sujets abordés, je sais juste qu’à un moment donné Espiègle s’est mise à parler, et que moi je l’écoutais.
Au vu de plus près, elle est plutôt mignonne. Des yeux bleus, les cheveux attachés, une voix un peu cassée, une silhouette légère, le teint pâle, je commence à lui trouver du charme. Alors je la regardais dans les yeux. Elle n’a pas eu le temps de terminer sa phrase que quelqu’un d’autre prend la parole. Vous savez ce moment où vous voulez parler de quelque chose et quelqu’un essaie de vous interrompre brutalement mais vous continuez coutez que coute en vous raccrochant à un regard. Et bien ce regard c’était le mien. Alors elle dit tout ce qu’elle a à dire et je poursuis, simple.
Elle finit par s’exclamer qu’on devrait sortir, c’est son dernier soir sur Brighton. Je fais mine de m’apercevoir qu’effectivement c’est vendredi soir et que ce serait bien qu’on fasse un truc. En vrai, je comptais encore hiberner mais il faut croire que mon instinct de player galérien a choisi ce moment pour faire son come back. Je demande à K., il est chaud, B. passe par là il est ok aussi, yes. En deux temps trois mouvement je passe de lunettes et polaire à jean huilé, chemise ajustée, sneakers, caban, et zéro lunette. Et les cheveux coiffés, tant qu’à faire.
On est sorti deux heures plus tard parce qu’une copine voulait faire un time’s up que finalement on n’a pas fait, la pauvre. Il est deux heures du matin. Entre temps, on est allé acheter un peu d’alcool et des mentos pour moi quant à K., il a fini par choper une canadienne, l’alcool aidant, il est désormais complètement ivre, ça promet.
Nous voilà partis, 3 mecs et deux filles.
K. s’avance à ma hauteur, je marchais un peu devant le groupe à ce moment là.
Crow : Bah alors, elle est où ta canadienne ?
K. : Ne m’en parle pas, elle n’arrête pas pas de me coller, c’est elle qui me cvherche mainten…"
Canadienne agrippant le bras de K. : « Hello »
J’en revenais pas. C’est la première fois que je voyais ça. Pour une fois c’est la fille qui avait fini par montrer trop d’intérêt d’un coup, et le mec qui prenait la fuite.
Elle l’entraîne dans sa course, il me lance un regard d’appel au secours, je lui fais un signe d’au revoir avec la main, un petit sourire aux lèvres.
Je retrouve Espiègle, la discussion se fait facilement, pas d’impressions de retombée imminente sur un blanc, cool. A mi-chemin, l’état d’ébriété de K. empire, il commence à dire n’importe quoi aux groupes qu’il croise. Et il a la bonne idée de dire fuck off à un groupe. Je me suis dit que les gens allaient laisser couler, et voilà qu’une femme complètement furax commence à l’interpeller et à l’embruiller. J’ai attrapé K. par l’épaule et je l’ai éloigné. Il va finir par se faire embarquer ce con, en plus on a croisé des voitures de flic. On arrive enfin à la boîte. La canadienne et B. ont disparu, K. s’avance aussi bourré que confiant vers les videurs pour présenter sa carte d’identité, il se fait refouler. Me voilà en boîte seul avec Espiègle. Il y a des jours comme ça. Déco rétro sympa, pas mal de monde, Espiègle remarque que l’endroit serait beaucoup mieux avec une meilleure musique. On va sur la piste de danse.
Eh eh eh. Je suis sûr que vous vous dîtes que je vais tenter un truc. J’aime votre fraîcheur.
La musique est vraiment pas géniale, on va se commander des bières, cidre pour moi. On s’installe à une table. Elle m’explique qu’elle ne comprend pas les gens qui commandent du cidre en boîte, je lui propose de goûter ce que j’ai pris. La musique est forte, pas facile de communiquer, finalement on va dehors, je la laisse deux secondes pour voir où sont passés les autres. Personne. Quand je reviens elle est en train de discuter avec un type, la trentaine, j’ai aucune envie de faire semblant de m’intéresser à ce gars, je les laisse et vais faire un tour dans la boîte. Je reviens un peu plus tard, le type ne l’a pas lâchée. Finalement K. a réussi à passer les videurs pour nous rejoindre sur l’espace aménagé é juste à côté de l’entrée de la boite. Je lui propose d’aller danser, Espiègle nous entend, elle nous rejoint, bye bye monsieur le player.
Le problème que je n’avais pas prévu, c’est qu’il y a également des videurs devant l’entrée de la salle qui sert de piste de danse, et visiblement l’un d’entre est physionomoiste puisqu’il reconnaît notre cher K. qui se fait raccompagner gentiment vers la sortie. C’est la première fois que je vois ça. Décidément, il n’aura pas fini de me surprendre. Je danse avec Espiègle , tant bien que mal, avec un rythme aussi foireux. Pourtant j’aime danser, c’est peu de le dire. On décide qu’il est l’heure de rentrer.
On retrouve B. complètement défoncé, apparemment il s’est fourni en substances illicites, il me demande 40 livres, il me les remboursera mardi c’est une promesse. Que dalle, j’aurais mis ma main à couper que le lendemain de son trip il aurait complètement oublié qu’il me devrait de l’argent. Et je ne suis pas crésus. La canadienne est là aussi, et un peu plus loin, assis sur un muret, K. en train de discuter joyeusement avec un set. Partout. Il est partout, ce type ne se repose jamais.
J’ai parlé avec Espiègle tout le long du chemin du retour. Elle est partie pour sa première année d’étude du côté de Seattle, a fait la deuxième année à paris et enchaîne une troisième année au royaume-uni. J’a-dore. Elle est juste capable de faire tout ce que je ne pouvais pas faire. A quel point faut-il des couilles pour partir seule dans une fac des états unis à 18 ans ? A 20 ans je prenais pour la première fois la voiture pour aller en boîte et j’ai attendu 21 ans avant de partir étudier à Paris. Heureusement que j’ai un peu changé depuis.
K. arrive à notre niveau, la démarche malassurée.
« Vous êtes beaux tous les deux » dit-il, puis se tournant vers notre aventurière relança de plus belle « Hein qu’il est beau ? ». Quand je pense que dans la vraie vie il est du genre tranquille comme moi.
Retour à l’auberge, Espiègle me dit qu’elle ira au carnaval de Brighton demain avec les autres de l’auberge. Pour ma part j’avais prévu de bosser sur l’ordinateur.
Je vais dansla cuisine manger un morceau, les autres vont se coucher. B. me retrouve, il se plante devant moi l’air complètement défoncé. Il veut 5 livres pour s’acheter du jambon et du fromage, soi disant. A 4 heures du matin. Soit, si ça peut me permettre d’avoir la paix. Le lendemain j’apprendrai qu’il s’est embrouillé avec la canadienne qui était restée apparemment avec lui. Il a insisté pour qu’elle lui paie un hamburger, et qu’il la rembourserait, évidemment elle n’a pas revu la couleur de son argent.
J’aimerais quand même rendre à César ce qui est à César, B. est un mec génial quand il n’est pas drogué, c’est même un des leaders de notre groupe. Seul anglophone de notre groupe de français qui me permets de pratiquer aussi souvent que je le veux, quand il propose un truc, c’est sûr à 90% que 3 ou 4 personnes seront de la partie. Personnellement, si j’arrive à mobiliser deux personnes c’est déjà un miracle.
Le lendemain arrive, c’est le jour du carnaval. J’essaie encore de me convaincre de travailler, mais les yeux bleus d’Espiègle sont trop bleus pour que je puisse dire non. Oui, cette excuse est nulle. On se chauffe pour partir, le temps que tout le monde soit prêt. J’en profite qu’espiègle soit en train de cuisiner seule pour lui demander son facebook, histoire de se recontacter quand elle reviendra sur Brighton. Une heure plus tard (sigh) on est enfin tous prêt. Avec nous Rocket, un mec super sympa à qui je dois mon intégration dans le groupe, Lys dont j’ai déjà parlé, qui est une black adorable et rayonnante qui a cette capacité à réunir autour d’elle les gens même si elle n’est jamais là à cause de ses horaires décalés, Mimi qui avait poposé le time’s up qui n’a pas eu lieu et avec qui je suis comme chien et chat, je la provoque et elle m’insulte, bref, c’est une affaire qui roule entre nous deux. Seulement voilà c’est le moment que choisit B. pour sortir de sa torpeur. On est obligé de l’attendre, du coup on part se poser sur la plage. Il fait beau, il fait chaud, une très belle journée, la première vraie journée où je me sens en été. Finalement le bougre nous rejoint.
La conversation se renoue avec Espiègle, je sens qu’on bat un peu de l’aile mais rapidement la connexion repart, ouf. On marche derrière les autres, tranquilles, on parle de sports nautiques, de plongée, de catamaran, tout en regardant les gens sur la plage. Je me sens bien avec elle, et je pense que ce doit être pareil pour elle. Elle ne serait pas là avec moi sinon. Et là je réalise. On était tellement absorbé par notre intéraction qu’on a perdu de vue le groupe au milieu de la foule qui s’était épaissie sur la route du front de mer. B. revient nous chercher, complètement furax. Sans déconner, c’est quoi son problème. « What’s wrong with you people ?! » s'exclama le type que l'on a attendu trois plombes sur la plage. Si on ne peut même plus profiter d’une balade avec fille charmante près de la plage par une belle journée, où va le monde, je vous le demande.
On rejoint le groupe, Rocket et B. font mumuse avec une baudruche en forme de ballon de rugby. Ballon qui finit évidemment par atterrir accidentellement sur la route au moment où un bus passe. La première roue passe juste à côté, la seconde l’écrase comme une crêpe. Ça doit être le même concept que pour les rasoirs à plusieurs lames. Il faut être sûr. Le ballon se regonfle comme un grand, on le sauve courageusement de son triste sort.
Chemin faisant, on s’arrête à une boutique, Lys veut acheter des paillettes, c’est carnaval après tout, il faut ajouter un zeste de festivité à notre excursion. Un peu plus loi, Espiègle me montre son futur appart qu’elle a déniché à la vitesse de l’éclair, au dernier étage d’une sympathique maison plutôt bien placée. Trente minutes de marche plus tard et de papotage avec le groupe et Espiègle, surtout Espiègle en fait, on arrive sur place. Stands typiques des foires, musique à balle dans les rues et parade sont au programme. On sort les paillettes, nous voilà en train de se faire barbouiller par les filles de paillettes, tels des guerriers revêtant leurs parures guerrières. Espiègle me masse l’oreille. Elle m’envoie un sourire, elle a trouvé comment se débarrasser les doigts de ses paillettes. Ça c’est du kino de haute voltige ou je ne m’y connais pas. Apparemment son idée relève du génie puisque Lys se charge de me faire l’autre oreille. Jamais mes écoutilles n’ont été aussi stylées.
Fin prêts, nous nous élançons dans la foule. On s’arrête pour regarder des musiciens, je continue un peu plus loin. J’entends quelqu’un m’appeler par mon prénom à travers la foule. C’est Espiègle. Ce brin de demoiselle me réchauffe le cœur, il n’y a pas à dire. Je rejoins le groupe. On s’arrête pour regarder des décorations avec Espiègle. Elle essaye un bob que j’avais aussi remarqué. Je teste, il me va mieux qu’à elle, on rigole.
Je fais remarquer à B. qu’on devrait se faire un petit selfie pour marquer cette journée. Espiègle sort son téléphone, cheese ! On adore la photo. Je lui fais promettre de la diffuser sur facebook.
La journée se passe, on délire, B. et Rocket font des touchdowns avec notre mascotte le ballon de rugby et nous on crie pour les encourager. J’essaye la veste trop grande d’espiègle, elle me va plutôt bien, je la garde sur moi. Elle est pas contre visiblement. On arrive à un de ces trucs pour gamins avec une roue pour hamster géante, des escaliers qui bougent et autre plateformes tournantes. C’est écrit « tous ages », nous voilà. Seuls Espiègle et Rocket restent en bas à nous regarder. Au milieu des gamins de 4 ans, on s’éclate encore plus qu’eux. Espiègle nous filme, et je croirais avoir remarqué qu’elle centrait légèrement sur moi après avoir regardé la vidéo.
Il est presque 18 heures, Lys doit aller travailler, je pars avec elle, il est temps que je prenne en main ce que j’aurais dû commencer depuis déjà 24 heures. Je dis au revoir à Espiègle qui doit partir dans la soirée, on se fait un hug, et je me suis éloigné en compagnie de ma charmante africaine. Ils sont rentrés une heure plus tard, j’ai papoté un peu avec Espiègle puis elle est partie. Elle devait partir la veille mais quand elle a rencontré notre communauté elle a décidé de rester un jour de plus.
J’ai repris contact avec elle aujourd’hui, soit deux jours après :
Crow : Hé Espiègle tu avais dit que tu partagerais notre superbe selfie collectif ! Ne le garde pas pour toi toute seule !!
Espiègle : C’est fait ;)
Crow : Merci ! Comme on est beau x)
Espiègle : Plus je la regarde, plus j’en doute ahah
Crow : C’est les paillettes qui sauvent tout
Ça change de mes reprises de contact d’il y a deux ans. Elle n’a pas continué la conversation. Peut-être qu’elle ne savait pas quoi répondre, ou qu’elle était occupée peu importe. Ça me va très bien comme ça.
Certains, peut-être tous, d’entre vous vont sans doute se demander pourquoi je raconte cette histoire. La réponse est simple, c’est parce que j’aime cette histoire et que je veux m’en rappeler plus tard. Le petit détail que je n’ai pas dit, c’est qu’elle a rapidement évoqué le fait qu’elle est en couple le premier soir, ce pourquoi je n’ai rien tenté avec elle. Simplement, j’ai le sentiment que si je l’avais dit au début de mon récit, l’histoire aurait perdu de son intérêt. Alors peut-être que notre relation ne mérite pas d’être vue comme basée sur la séduction. Mais qu’est-ce que la séduction ? Faut-il obligatoirement avoir un échange de regards enflammés ? Faut-il forcément porter des vêtements aguicheurs ? Le simple fait de marcher près d’une plage en savourant la conversation présente au point d’en oublier le reste du groupe ne peut-il pas être considéré comme de la séduction?
Je veux me souvenir de cette fille. Et à chaque fois que je regarde cette photo qu’elle a prise j’ai un sourire. Bon sang, je me mets les larmes aux yeux avec mes propres conneries. Moi en tout cas, elle m’a séduit, si c’est réciproque tant mieux j’en serais très heureux. Mais je sais que ça l’est. Au pire j’aurais gagné une très bonne amie.
Il n’y a pas si longtemps je m’interdisais de fréquenter les filles en couple par peur de tomber amoureux d’elles et de le regretter, de même que je ne donnais plus mon facebook à celles qui m’intéressent par peur d’être jugé. Mais c’est des conneries, en faisant ça on se prive de rencontres et de moments géniaux comme une sortie en boîte ou un carnaval, et si je ne lui avais pas donné mon facebook, je n’aurais jamais vu la couleur de cette photo. Le fait qu’une fille est en couple n’est définitivement pas une excuse pour rester sans rien faire.
On va finir par y arriver à ce kissclose les gars. Ce ne sera pas avec elle mais ça fait deux filles d’affilée que je rencontre, qui m’intéressent et avec qui je crée une connexion plus que satisfaisante. Ça ne peut qu’aller en s’améliorant.
C’est tout pour moi, si vous avez réussi à tout lire, je vous en remercie.