La passion, délice du risque
Posté : 10.03.17
La passion.
J’ai envie d’en faire un sujet car elle m’a happée un jour.
Définition dictionnaire : sentiment ardent, dépassant la plupart du temps le raisonnement.
Je laisse parler le poète, FB Hoffmann (le mal d’amour - pensées fugitives - 1802) :
N'avoir qu'une seule pensée,
N'éprouver qu'un seul sentiment,
Avoir toujours l'âme oppressée
Par un chagrin plein d'agrément ;
Voir et sentir toujours de même
Matin et soir et nuit et jour :
Voilà comme on est quand on aime,
Voilà le mal qu'on nomme amour.
Quitter sa mie avec tristesse,
Et vouloir être au lendemain ;
La revoir avec douce ivresse,
Trembler en lui prenant la main ;
Ne parler que pour dire j'aime,
Le répéter le long du jour,
Le lendemain dire de même :
Voilà le mal qu'on nomme amour.
Regarder comme un bien suprême
La plus légère des faveurs,
Ressentir un tourment extrême
À la moindre de ses rigueurs ;
Pleurer, rire, espérer et craindre,
Jouir et souffrir tour à tour :
Si c'est un mal, faut-il s'en plaindre ?
C'est le doux mal qu'on nomme amour.
_____
Remontant aux philosophes grecs, à l’analyse des psys, il semble que l’état amoureux se décline en trois types.
Eros, l’amour passion.
Un petit ange décochant ses flèches. Ce coquin joufflu nous bouscule au point de nous perdre. J’y reviendrais, c’est le but.
Agapê, l’amour amitié.
Une relation amoureuse fondée sur le partage et la communication. Avec le risque d’une tiédeur émotionnelle car la séduction est souvent mise de côté.
Philia, l’amour profond.
Bonne compréhension de soi-même et de l’autre. L’idée de vivre ensemble sans fantasmer son partenaire, sans laisser les fantômes du passé nous atteindre.
Cette introduction faite, n’engageant que moi comme tout ce qui va suivre, autopsie d’un ange entraînant de son sourire enjôleur vers des abîmes.
Eros.
Nous connaissons tous (enfin je vous le souhaite), l’emballement d’une rencontre, un partenaire intéressant et intéressé, le désir, l’envie de partager autant le sexe que des activités, avec simplement l’idée de voir où la barque peut mener. Pas de précipitation, pas de crainte, le présent à deux dont on profite sans s’oublier soi. 1 + 1 = 3.
L’autre nous passionne, de même pour lui, nous sommes sur un petit nuage, nous parlons parfois de « coup de foudre ».
Sauf que la passion dans sa version noire encre n’a rien à voir avec cette description idyllique.
Pour l’avoir connu deux fois dans ma vie,
l’une de ces relations a glissé avec aisance au fil du temps vers l’amour profond. J’en garde un magnifique souvenir mais là n’est pas mon propos.
L’autre m’a mise à genoux. Et même si son souvenir reste à jamais gravé dans ma mémoire de par son effervescence folle, je sais aujourd’hui que je me suis sauvée d’un piège mortifère.
Bon Perle, alors c’est quoi cette passion terrible dont tu veux parler ?
Elle se caractérise par des ascensions qui rendent ivre sans alcool, des descentes sans parachute. Sans cesse. Sans passé, sans avenir.
Le désir brut, impétueux, exigeant, bouleversant au point de ne plus s’appartenir. D’obséder. De résumer sa vie à un fil dont la nourriture nous devient indispensable, pire, vitale.
Pour imager, c’est un soleil qui ne caresse pas malgré les caresses que l’on donne et reçoit. Qui ne brûlent pas la peau mais la moindre parcelle d’âme.
C’est l’excitation alternant avec la peur, un désir physique insatiable qui n’empêche le manque de l’autre tout le temps, dès qu’il a franchit la porte, c’est un partenaire non plus sujet mais objet. Objet chargé non de nous faire du bien mais de combler nos cases affectives. C’est le chant des sirènes d’Ulysse, l’idéalisation de l’autre à la puissance mille, la perte de contrôle de ce que l’on est, de ce que l’on croyait être, la chaîne que nous passons à notre cou, dont l’éclat nous fait perdre de vue notre asservissement autant souhaité que redouté.
La passion est une émotion et non un sentiment. Elle enferme dans la possession au lieu d’ouvrir sur le don à l’autre, la confiance. Une perte de contrôle de ce que nous sommes, un amour de soi mis au panier alors même que cela nous mine.
Et pourtant la passion est séduisante.
Par son côté hors la loi, hors norme.
Dans un quotidien un peu trop réglé, elle fait vibrer d’une souffrance exquise.
Une bulle de liberté, transgressive et d’une beauté unique.
Un shoot donnant la sensation de voler avec un appétit d’ogre et une satisfaction sexuelle au-delà de tout ce qui est imaginable.
Partager cette passion à deux permet de s’abandonner l’un à l’autre, une jonction qui dépasse les corps, permettant de lire l’intime de l’autre dans ce qu’il a de plus complexe.
Ce n’est pas simplement faire l’amour mais rire et pleurer à la fois, une émotion qu’aucun mot d’aucune langue ne peut traduire.
Cette passion-souffrance peut-elle durer ?
En l’état, je ne pense pas.
Soit elle se transforme, Agapê ou Philia, au choix de chacun.
Soit l’un des partenaires n’en peut plus. Le fantasme tombe tel un masque, suivi de la déception d’une relation d’où toute construction est impossible pour des tas de raisons.
De l’état « je préfère jouir de la passion que me passer de l’autre » succède la constatation terrible « la souffrance est telle qu’il faut que je sauve ma peau ».
Et c’est la fin.
Avec tous les symptômes du manque qui font hurler. Parce que cette fin n’est pas anodine. C’est une partie de nous que l’on arrache.
C’est résister à la moindre sollicitation en se drapant du voile de l’indifférence alors qu’on a juste envie de sa dose.
C’est faire appel à notre pauvre raison qui de toute façon est en grève.
C’est bosser comme un fou, solliciter ses amis, et une fois rentré chez soi, retrouver l’enfer titillant de faire n’importe quoi. Humer une peau, succomber à des lèvres qui savent être si douces, s’offrir et prendre un instant ou quelques heures d’un plaisir qui va encore une fois nous mettre à terre. Dire plus jamais et recommencer.
Et puis, tenace parce qu’il le faut pour ne pas se noyer plus encore, on retrouve sa raison. Non dans ce qu’elle a de restreignant mais dans son aspect soignant.
Avec le temps, nous y gagnons une meilleure connaissance de nous dans ce que nous avons de sombre et de vivant.
Avec l’envie de vivre une relation plus pleine où deux partenaires sont acteurs, à la fois de leur vie personnelle et de celle du couple.
Sans pour autant en ce qui me concerne, oublier qu’une petite cicatrice au fond de mes tripes reste précieuse parce qu’elle a correspondu à un moment de ma vie à une envie dont je n’ai pas bridé l’envol et heureusement.
Ce mec et sa version noire encre… je suis à priori sevrée et passée à autre chose mais je préfère ne plus croiser sa route. Ma petite cicatrice aurait, qui sait, la mauvaise idée de s’enflammer. Et me consumer définitivement par la même occasion.
On entend souvent parler d'addiction. La passion en est une. Elle vous tombe dessus sans prévenir. Bien malin celui qui dirait "moi, jamais".
A connaître si nous en avons l'opportunité. Mais nous sommes pleinement acteur de cette opportunité. L'autre ne force rien, ne choisit pas plus. Il partage à l'instant T une aventure risquée, aussi magique que dévorante.
C'est ainsi.
J’ai envie d’en faire un sujet car elle m’a happée un jour.
Définition dictionnaire : sentiment ardent, dépassant la plupart du temps le raisonnement.
Je laisse parler le poète, FB Hoffmann (le mal d’amour - pensées fugitives - 1802) :
N'avoir qu'une seule pensée,
N'éprouver qu'un seul sentiment,
Avoir toujours l'âme oppressée
Par un chagrin plein d'agrément ;
Voir et sentir toujours de même
Matin et soir et nuit et jour :
Voilà comme on est quand on aime,
Voilà le mal qu'on nomme amour.
Quitter sa mie avec tristesse,
Et vouloir être au lendemain ;
La revoir avec douce ivresse,
Trembler en lui prenant la main ;
Ne parler que pour dire j'aime,
Le répéter le long du jour,
Le lendemain dire de même :
Voilà le mal qu'on nomme amour.
Regarder comme un bien suprême
La plus légère des faveurs,
Ressentir un tourment extrême
À la moindre de ses rigueurs ;
Pleurer, rire, espérer et craindre,
Jouir et souffrir tour à tour :
Si c'est un mal, faut-il s'en plaindre ?
C'est le doux mal qu'on nomme amour.
_____
Remontant aux philosophes grecs, à l’analyse des psys, il semble que l’état amoureux se décline en trois types.
Eros, l’amour passion.
Un petit ange décochant ses flèches. Ce coquin joufflu nous bouscule au point de nous perdre. J’y reviendrais, c’est le but.
Agapê, l’amour amitié.
Une relation amoureuse fondée sur le partage et la communication. Avec le risque d’une tiédeur émotionnelle car la séduction est souvent mise de côté.
Philia, l’amour profond.
Bonne compréhension de soi-même et de l’autre. L’idée de vivre ensemble sans fantasmer son partenaire, sans laisser les fantômes du passé nous atteindre.
Cette introduction faite, n’engageant que moi comme tout ce qui va suivre, autopsie d’un ange entraînant de son sourire enjôleur vers des abîmes.
Eros.
Nous connaissons tous (enfin je vous le souhaite), l’emballement d’une rencontre, un partenaire intéressant et intéressé, le désir, l’envie de partager autant le sexe que des activités, avec simplement l’idée de voir où la barque peut mener. Pas de précipitation, pas de crainte, le présent à deux dont on profite sans s’oublier soi. 1 + 1 = 3.
L’autre nous passionne, de même pour lui, nous sommes sur un petit nuage, nous parlons parfois de « coup de foudre ».
Sauf que la passion dans sa version noire encre n’a rien à voir avec cette description idyllique.
Pour l’avoir connu deux fois dans ma vie,
l’une de ces relations a glissé avec aisance au fil du temps vers l’amour profond. J’en garde un magnifique souvenir mais là n’est pas mon propos.
L’autre m’a mise à genoux. Et même si son souvenir reste à jamais gravé dans ma mémoire de par son effervescence folle, je sais aujourd’hui que je me suis sauvée d’un piège mortifère.
Bon Perle, alors c’est quoi cette passion terrible dont tu veux parler ?
Elle se caractérise par des ascensions qui rendent ivre sans alcool, des descentes sans parachute. Sans cesse. Sans passé, sans avenir.
Le désir brut, impétueux, exigeant, bouleversant au point de ne plus s’appartenir. D’obséder. De résumer sa vie à un fil dont la nourriture nous devient indispensable, pire, vitale.
Pour imager, c’est un soleil qui ne caresse pas malgré les caresses que l’on donne et reçoit. Qui ne brûlent pas la peau mais la moindre parcelle d’âme.
C’est l’excitation alternant avec la peur, un désir physique insatiable qui n’empêche le manque de l’autre tout le temps, dès qu’il a franchit la porte, c’est un partenaire non plus sujet mais objet. Objet chargé non de nous faire du bien mais de combler nos cases affectives. C’est le chant des sirènes d’Ulysse, l’idéalisation de l’autre à la puissance mille, la perte de contrôle de ce que l’on est, de ce que l’on croyait être, la chaîne que nous passons à notre cou, dont l’éclat nous fait perdre de vue notre asservissement autant souhaité que redouté.
La passion est une émotion et non un sentiment. Elle enferme dans la possession au lieu d’ouvrir sur le don à l’autre, la confiance. Une perte de contrôle de ce que nous sommes, un amour de soi mis au panier alors même que cela nous mine.
Et pourtant la passion est séduisante.
Par son côté hors la loi, hors norme.
Dans un quotidien un peu trop réglé, elle fait vibrer d’une souffrance exquise.
Une bulle de liberté, transgressive et d’une beauté unique.
Un shoot donnant la sensation de voler avec un appétit d’ogre et une satisfaction sexuelle au-delà de tout ce qui est imaginable.
Partager cette passion à deux permet de s’abandonner l’un à l’autre, une jonction qui dépasse les corps, permettant de lire l’intime de l’autre dans ce qu’il a de plus complexe.
Ce n’est pas simplement faire l’amour mais rire et pleurer à la fois, une émotion qu’aucun mot d’aucune langue ne peut traduire.
Cette passion-souffrance peut-elle durer ?
En l’état, je ne pense pas.
Soit elle se transforme, Agapê ou Philia, au choix de chacun.
Soit l’un des partenaires n’en peut plus. Le fantasme tombe tel un masque, suivi de la déception d’une relation d’où toute construction est impossible pour des tas de raisons.
De l’état « je préfère jouir de la passion que me passer de l’autre » succède la constatation terrible « la souffrance est telle qu’il faut que je sauve ma peau ».
Et c’est la fin.
Avec tous les symptômes du manque qui font hurler. Parce que cette fin n’est pas anodine. C’est une partie de nous que l’on arrache.
C’est résister à la moindre sollicitation en se drapant du voile de l’indifférence alors qu’on a juste envie de sa dose.
C’est faire appel à notre pauvre raison qui de toute façon est en grève.
C’est bosser comme un fou, solliciter ses amis, et une fois rentré chez soi, retrouver l’enfer titillant de faire n’importe quoi. Humer une peau, succomber à des lèvres qui savent être si douces, s’offrir et prendre un instant ou quelques heures d’un plaisir qui va encore une fois nous mettre à terre. Dire plus jamais et recommencer.
Et puis, tenace parce qu’il le faut pour ne pas se noyer plus encore, on retrouve sa raison. Non dans ce qu’elle a de restreignant mais dans son aspect soignant.
Avec le temps, nous y gagnons une meilleure connaissance de nous dans ce que nous avons de sombre et de vivant.
Avec l’envie de vivre une relation plus pleine où deux partenaires sont acteurs, à la fois de leur vie personnelle et de celle du couple.
Sans pour autant en ce qui me concerne, oublier qu’une petite cicatrice au fond de mes tripes reste précieuse parce qu’elle a correspondu à un moment de ma vie à une envie dont je n’ai pas bridé l’envol et heureusement.
Ce mec et sa version noire encre… je suis à priori sevrée et passée à autre chose mais je préfère ne plus croiser sa route. Ma petite cicatrice aurait, qui sait, la mauvaise idée de s’enflammer. Et me consumer définitivement par la même occasion.
On entend souvent parler d'addiction. La passion en est une. Elle vous tombe dessus sans prévenir. Bien malin celui qui dirait "moi, jamais".
A connaître si nous en avons l'opportunité. Mais nous sommes pleinement acteur de cette opportunité. L'autre ne force rien, ne choisit pas plus. Il partage à l'instant T une aventure risquée, aussi magique que dévorante.
C'est ainsi.