(sorry braindump)
Ouais donc, difficile (pour moi en tout cas) de ne pas être extrêmement pessimiste (même si je sais que c'est un travers chez moi et qu'in fine c'est toujours subjectif et jamais si pire que ça).
Je ne vois pas bien comment la société peut survivre au fait que :
- plus aucune raison rationnelle de faire des études longues pour des métiers qui seront mieux pratiqués par des IA (pourquoi s'emmerder à devenir ingénieur, médecin, chirurgien, ... ?); et du coup, dans 10-15 ans, qui sera encore dépositaire de ces savoirs si plus personne ne les apprend, ne les pratique et ne les transmet ? La connaissance va devenir une boîte noire, détenue / mise en oeuvre par l'IA et les robots, hors de portée des humains car plus le bagage intellectuel ET les rampes d'accès pour se l'approprier.
- si une IA est une meilleure amie, un meilleur psy, une meilleure confidente et une meilleure amoureuse qu'un humain changeant, imparfait, compliqué, quel incentive à chercher des relations humaines frustrantes, qui demandent des efforts et de la persévérance ?
Et de là, si on n'a plus de raison forte de chercher à grandir et à s'ajuster au contact des autres, comment est-ce qu'on évite une société où tout le monde est devenu plus ou moins sociopathe du fait d'une moindre nécessité de s'ajuster à la vie en collectif ? A plus forte raison si on ne travaille plus parce que l'IA a fait disparaitre des millions d'emplois ?
+ le combo mortifère brainrot des réseaux sociaux / téléréalité / dating apps qui ont déjà grandement pourri les cerveaux et notre rapport à la dopamine et aux autres.
Je pense qu'on fonce vers un effondrement accéléré de ce qui fait le tissu de la société (le vivre ensemble, si imparfait et grinçant soit-il, tolérance/patience vis à vis de l'autre), un effondrement cognitif, et un effondrement des valeurs morales (impulse control, résistance à la frustration, gratification retardée, , valorisation de l'effort et de l'accomplissement dans le réel).
Pour moi on va voir les gens devenir de plus en plus impatients, irritables, intolérants, sous-intellectualisés (c'est pour pas dire teubés), limbiques.
+ tensions sociales et violence du fait de la destruction des emplois ET du désoeuvrement existentiel ("je fais quoi de ma vie si j'ai plus rien à faire professionnellement ?" et "comment je gagne ma vie si je veux pas 1. vendre de la drogue 2. me goder devant des cams sur OnlyFans ?").
Et à mon échelle perso (à un niveau bien moindre que Jalap), le fait d'utiliser Claude Code au quotidien, au delà du risque d'être remplacé (moindre pour moi du moment que la boite de mon employeur subsiste - sinon je suis mort), m'érode le cerveau à vitesse grand V. J'ai beau tout faire pour continuer à me stimuler intellectuellement (je suis tout sauf passif), je vois que l'usage quotidien de l'IA dans mon boulot m'enlise intellectuellement. Une dépendance pernicieuse : c'est pratique, mais ça rend intellectuellement mou et paresseux, et ça, quand bien même j'en suis conscient et je fais gaffe.
Je sais que j'ai tendance à doomeriser, que je le fais depuis des années; le problème c'est que jusqu'à présent les faits m'ont pas trop donné tort.
Et là, je vois vraiment pas comment on évitera de basculer dans le chaos & la violence à horizon 10 ans. Et encore moins comment on en sortira.
(et ça, c'est sans même factorer un risque grandissant de conflit armé + le déréglement climatique et ses conséquences bien réelles + la chute de natalité + l'effondrement intellectuel des générations suivantes, sur lesquelles on compte pour s'occuper de nous / faire tourner l'économie).
Bref, en mode sauve qui peut, mais pour aller où ? Pour faire quoi ? A moins d'être blindé et d'avoir des solutions de repli (qui vont s'amenuiser de + en +), quelles sont les possibilités ?
** edit : bon, en fait, la vie a toujours été un jeu de survie et à la fin on meurt, et on essaie juste de retarder l'échéance et de donner de l'élan et des bons réflexes à nos enfants. Juste là, on est en train de basculer en mode difficile; et ça sera plus ou moins difficile selon le métier qu'on fait et le nombre de zéros dont on dispose déjà. Et si on raisonne à l'échelle de la société, j'arrive pas à me projeter au-delà des 20 prochaines années.
Les chercheurs en intelligence artificielle arrêtent d'épargner pour la retraite, craignant que le monde ne dure pas
=> c'est raccoleur, mais en vrai, le raisonnement se tient.
J'estime mon gain de productivité moyen à 25% avec Claude ou ce faux-naïf de ChatGPT. Je me documente et j'expérimente au quotidien.
En ce qui me concerne, dans mon usage pro au quotidien : le gain en productivité pure serait de l'ordre de 25-30% pour moi. Il crache du code + vite, mais je passe énormément de temps à formuler mes besoins, réfléchir / documenter / cadrer / controler => au final, manager - et ça se tient en fait : je suis le concepteur, mon taf c'est de concevoir + que juste écrire.
Par contre gros gain en capacité (j'arrive à m'attaquer à + lourd, plus ambitieux : là pour le coup, plus aucune limitation technique, plus de syndome de l'imposteur : du moment que j'arrive à architecturer / conceptualiser ET à piloter ses efforts, no limit à part celles de mon cerveau).
Donc gain net, je dirais +80% (je suis + capable qu'avant), peut-être plus même si on considère qu'il me permet d'attaquer des projets que je n'aurais carrément pas osés, et ce sens, peut-être qu'il m'aide à rester dans la course, auquel cas le gain est inestimable.
Pour l'instant je dirais que Claude Code (je n'utilise plus du tout GPT, et très rarement Gemini, juste pour du ponctuel anecdotique) a fait de moi un manager, qu'il me permet d'être full architecte, et qu'il est une espèce de junior super doué mais qui manque de focus, de rigueur et de fiabilité. Si la boite de mon employeur survit, je ne crois pas que mon job soit menacé car je suis un homme clé dans le sens où j'ai tout construit moi-même et qu'on a atteint un niveau de spécificité qui rend nos système un peu legacy (sans forcément être obsolètes pour autant, juste, ultra spécifiques).
- il est bon pour écrire et implémenter
- il est de plus en plus bon pour abstracter / comprendre mes intentions / tenir compte d'un contexte et trouver un chemin (MAIS : rarement le meilleur du premier coup; si je ne suis pas hyper engagé dans la lecture critique de ce qu'il propose, il va quasi toujours complexifier inutilement, ou rajouter des détours / des étapes absurdes ou superflues : ça c'est assez épuisant intellectuellement)
- sa fiabilité varie ENORMEMENT selon les jours (certains matins, direct je vois qu'aujourd'hui sera un enfer parce qu'il sera ultrateubé)
- il reste mauvais pour penser out of the box : les solutions élégantes, les breakthrough, les renversement de perspective, ils viennent 100% de moi : s'il part en boucle, jamais il n'arrivera à s'arrêter et à trouver le bon angle, ça viendra toujours de moi). Au final c'est un rédacteur, pas un solveur.
- si je lui demande expressément LEAN DRY YAGNI (succinct / pas de complexité superflue, factorisation et pas de répétitions et parcimonie), alors il fait globalement de la qualité et j'avance, pour peu que je challenge et que je controle ses propositions.
J'ai pas mal galéré à le dompter, puis j'ai trouvé un workflow à peu près
optimal satisfaisant :
- documenter les taches complexes dans une issue GH (description du problème ou de l'intention
- analyse de l'existant => documentation des findings
- après réflexion LEAN DRY YAGNI => documentation de la solution retenue
- ET ENSUITE implémentation
- /compact & commit fréquents
- "ultrathink" si on marche sur des oeufs et que j'ai besoin qu'il fasse une analyse approfondie / de grande ampleur
- JAMAIS de refacto à grande échelle en roue libre : recette pour un désastre
C'est pas encore imparable, mais en faisant comme ça je m'évite les crises de nerfs que j'avais encore 1 mois où il me saccageait des jours de code / des pans entiers du projet.
En fait il faut pas lui lacher la bride et faire petit bout par petit bout, et commit souvent.
Paradoxalement, trop de .md tue le .md parce que 1. je perds du temps à sans cesse rafraichir / synthétiser / affiner et 2. il garde pas tout en contexte de toute façon : ces dernières semaines, j'ai levé le pied sur la doc et je m'aperçois que ça marche pas moins bien, et je traite davantage d'issues au final.
Autre paradoxe aussi : j'ai voulu sophistiquer mon usage de Git et ça m'a niqué. Mes pires catastrophes industrielles, ça vient de lui qui s'embrouille dans les opérations GIT et les différentes branches, et qui me régresse vers des versions obsolètes du code : maintenant je fais tout sur une seule branche et j'ai moins d'emmerdes. Je suis pas assez pointu en Git pour en faire un usage + virtuose et lui non plus apparement.
J'ai expérimenté avec un ou deux MCP pour voir comment étendre ses capacités (notamment mémoire, doc & planification) et en fait dans mon cas ça n'apporte pas grand chose, je l'utilise vanille et il fait déjà
très bien le taf pour ce que je lui fais faire. Eventuellement pupetteer pour la capacité à visualiser l'UI et les problèmes, mais je l'utilise en fait assez peu pour l'instant.
Et enfin, charge mentale de fou, plus haute que jamais, à avoir le sentiment / l'anxiété de courir après un outil en perpétuelle évolution, qui change plus vite que ce que j'arrive à assimiler. + les vidéos putaclics de youtubeurs vide-codeurs qui donnent l'impression qu'on peut pondre une app en 2 jours n'aident pas : sensation de perpétuellement courir après le train.
A tout le moins, depuis 3-4 mois que je l'utilise (avant je faisais via Claude web avec mon repo en project knowledge : bancal), Claude Code a complètement bouleversé mon métier et la façon dont je le pratique (+ nouvelle façon de rythmer mes journées : IA tant que je peux, puis non-Ia en attendant que ça revienne, etc : mes journées sont en pointillés).
Pour moi le danger vient du risque économique qui pèse sur ma boite, davantage qu'un risque de remplacement par l'IA.
Aussi (mais ptet pas sa faute), autant j'aime toujours l'aspect créatif de mon métier (empiler des idées & solutions pour construire des trucs complexes), autant le web me dégoute à présent, le désamour web/frontend est total. En grande partie parce que la fierté artisanale de construire des UI a été désacralisée par l'IA qui rend ça brut, mécanique, anecdotique.
Donc tout ça mis bout à bout : entre charge mentale, sentiment de perte de sens / de beauté du geste, anxiété de l'avenir, sentiment d'avoir gravement merdé ma trajectoire de vie, frustrations du quotidien, dégoût de ce qu'est devenu Internet, attentes du boss et attentes de moi-même : compliqué de garder sa santé mentale (on va dire que pour l'instant je tiens bon, mais je sens qu'il faudrait pas grand chose pour me mettre profond sous l'eau). L'eau monte, je surnage encore, mais je commence à fatiguer et à la moindre crampe je bois la tasse.