J'ai lu ce livre avec beaucoup d'intéret, et j'ai été surpris de constater qu'il pouvait peut etre avoir sa place sur FTS. A priori, rien a voir avec la séduction, car Feynman nous livre des petits bouts de sa vie, sans fil conducteur. Mais en fait ce livre est un exemple de story telling. Plusieurs dizaines d'histoires y sont racontées, et pour peu qu'on s'imagine l'auteur a coté de nous en train de nous les conter a voix haute, ca donne un petit appercu de ce qui rend quelqu'un de spécial. Feynman est un joyeux luron qui passait tres rarement inapercu partout ou il allait. Il nous raconte comment.Richard Feynman fut un scientifique hors norme. Non seulement il contribua en profondeur à la grande aventure de la physique des particules élémentaires, depuis la fabrication de la bombe atomique pendant la guerre alors qu'il n'a pas 25 ans, jusqu'à ses diagrammes qui permettent d'y voir un peu plus clair dans les processus physiques de base. Non seulement il fut un professeur génial, n'hésitant pas à faire le clown pour garder l'attention de ses étudiants et à simplifier pour aller à l'essentiel. Mais il mena une vie excentrique - collectionneur, bouffon, impertinent, joueur de bongo, amateur de strip-tease, séducteur impénitent, déchiffreur de codes secrets et de textes mayas, explorateur en Asie centrale -, qu'il raconte ici avec l'humour du gamin des rues de New York qu'il n'a jamais cessé d'être.
Au dela de cet aspect story telling qui peut éclairer sur comment avoir une vie et une personnalité intéressante, il y a quelques passages consacrés a sa découverte des femmes, sachant qu'il était mister gentleman nice guy. Extraits:
== Un professeur doit avoir l'air respectable ==
J'ai alors invité une autre jeune fille. Comme les précédentes, elle m'a demandé :
"Que faites-vous ? Etes-vous en première année ? (Il y avait pas mal d'étudiants qui avaient l'air relativement âgés, tous ceux qui avaient interrompu leurs études pendant la guerre.)
- Non, je suis professeur.
- Professeur de quoi ?
- De physique théorique.
- J'imagine évidemment que vous avez travaillé à la fabrication de la bombe atomique ?
- Oui, j'étais à Los Alamos pendant la guerre.
- Menteur, je ne vous crois pas ", m'a-t-elle jeté à la figure en me plantant là.
Ca ma grandement soulagé. Je comprenais enfin ce qui se passait. Comme un imbécile, je leur avais tout simplement et tout bêtement dit la vérité. Je faisais fuir les filles en me montrant correct, poli, gentil, en répondant aux questions qui m'étainet posées. Tout marchait bien jusqu'à un certain point ; et puis, tout à coup, plus rien. Je ne m'en étais pas aperçu jusqu'à ce que celle-ci me traite de menteur.
J'ai alors essayé d'esquiver les questions ; et ça a produit l'effet exactement inverse.
"Etes-vous en première année ?
- Euh, non.
- En dernière année ?
- Non.
- Alors, qu'est-ce que vous faites ?
- J'aime mieux ne pas le dire.
- Mais pourquoi ?
- Je ne veux pas le dire..."
Du coup elles, ne me lâchaient plus. C'est comme celà que je me suis retrouvé chez moi avec deux jeunes personnes.
== Il suffit de demander ==
Finalement je leur ai avoué ce qui me chagrinait "Je suis passablement intelligent. Je veux bien admettre que mon intelligence est limitée à la physique. Mais il y a ici ges gens tout aussi intelligents que moi, des gens du pétrole, des businessmen, etc. Et tous ces types dépensent un fric fou avec les filles sans aucun résultat. (J'avais cru comprendre que personne n'arrivait à rien avec les filles). Je n'arrive pas à comprendre comment il se fait que tous ces gens intelligents puissent se faire rouler à ce point.
- Moi, ça ne m'étonne pas, m'a répondu le mari de Gloria. Je sais comment ça fonctionne. Si vous voulez, je peux vous apprendre comment faire pour obtenir tout ce que vous voudrez des filles dans les bars. Mais auparavant, pour vous prouver que je sais réellement de quoi je parle, Gloria va obliger un type à vous payer du champagne, oui, à vous."
[...]
Voilà, c'était simple comme bonjour. Après la fermeture du bar, j'ai rejoint Gloria et son mari à leur motel. Ils jubilaient : ça avait marché exactement comme ils l'éperaient.
"C'est bon ; Je suis maintenant convaincu que vous savez de quoi vous parlez. Alors, apprenez moi tout ce que je dois savoir.
- D'abord, un premier principe : les types dans ce genre de situation veulent tous avoir l'air de gentlemen. Ils ne veulent pas que l'on puisse dire d'eux qu'ils sont impolis ou mal élevés, et surtout pas qu'ils sont radins. A partir du moment où une fille a percé à jour les motivations d'un type, elle peut lui faire faire n'importe quoi. En conséquence : ne jamais rien payer à une fille - même pas un paquet de cigarettes - avant de lui avoir demandé de coucher avec elle et de s'être assuré qu'elle ne ment pas et couchera effectivement avec vous.
- Vous voulez dire qu'il faut le leur demander... comme ça ?
- Oui. Je sais, vous êtes encore novice et peut-être n'arriverez-vous pas du premier coup à vous conduire de façon aussi brutale. Dans ce cas là, payez à la fille un petit quelque chose ; mais dites-vous bien que ça ne vous facilitera pas la tâche finalement."
[...]
Deux minutes ne s'étaient pas écoulées qu'Ann m'avait déjà invité à venir m'asseoir à leur table. "Une vraie pute, me suis-je dit. Il lui paie à boire et elle a le culot d'inviter quelqu'un d'autre." "Non merci, je vois très bien de là où je suis", ai-je répondu.
[...]
C'était loupé ; j'avais échoué, malgré les leçons de mon "maître". J'avais acheté pour un dollar dix cents de sandwiches, sans lui demander quoi que ce soit auparavant, et maintenant c'était fichu : je n'obtiendrais rien d'elle. Mais il fallait que je récupère mon argent, ne serait-ce que pour l'honneur de mon "maître". Je me suis arrêté de marcher et je lui ai lancé à la figure : "Tu es pire qu'une putain."
[...]
Après avoir mangé, je suis retourné au bar et j'ai tout raconté à mon "professeur". Je lui ai expliqué que j'avais échoué lamentablement, mais qu'au moins j'avais récupéré mon argent.
"Oh alors, très bien, a-t-il dit ; comme vous avez réussi à ne rien lui payer, elle va coucher avec vous dès ce soir.
- Quoi ?
- Oui, a-t-il répété, dès ce soir. Je vous assure.
- Mais elle n'est même pas là ! Elle est chez elle avec le lieut...
- Ne vous en faites pas."
[...]
Pendant que nous nous rendions en ville, je me demandais si j'oserais essayer la technique de mon maître d'Albuquerque. Se conduire comme le dernier des goujats avec une fille rencontrée dans bar, ce n'était pas si difficile ; mais avec une vraie jeune fille, élevée dans le Sud...
Nous sommes entrés dans le bar et avant même que nous nous soyons assis, je lui ai dit, tout de go : "Ecoutez, avant que je vous paie à boire, je veux vous poser une question : voulez-vous coucher avec moi ?
-Oui."
Ca marchait donc même avec les vraies jeunes filles.
== Mais certainement Monsieur Big ! ==
Nous sommes allés nous asseoir à coté des filles. Une serveuse nous a demandé ce que nous voulions boire. J'ai commandé de l'eau et la fille à côté de moi m'a demandé si elle pouvait prendre du champagne : "Tout ce que vous voudrez, ai-je répondu froidement ; c'est vous qui payez.
- Hein ? Quoi ? Vous êtes radin ou quoi ?
- C'est ça, je suis radin.
- On peut dire que vous êtes tout sauf gentleman."
Depuis mon apprentissage au Nouveau-Mexique, je savais qu'il ne faut pas se conduire en gentleman. Finalement, ce sont elles qui m'ont payé à boire - le monde à l'envers (quant au magnat du pétrole, il avait disparu entre-temps).
[...]
J'étais alors complètement persuadé que s'il entrait dans mon jeu c'était pour rencontrer des filles, et uniquement pour ça. J'en ai profité pour aborder un sujet délicat : "J'ai rencontré votre femme l'autre soir."
[...]
Mettant en oeuvre ma stratégie habituelle - ne pas avoir l'air impressionné et ne pas se conduire en gentleman -, je me suis commandé à boire, sans rien lui proposer.
"Vous savez certainement que je suis l'une des meilleures avocates de Las Vegas.
- Possible, ai-je rétorqué d'un ton glacial. Je ne doute pas que dans la journée vous excerciez la profession d'avocat ; mais ce que je vois, c'est que le soir vous draguez dans un bar, un bar minable même."
Ce genre de grossièreté n'était pas pour lui déplaire. Nous avons fait ensemble la tournée des bars de Las Vegas ; c'était très bien.
