Re: L'homme drôle
Posté : 30.05.22
par The_PoP
Sur la partie que t’as trouvé limite je vais pas épiloguer, Onmyoji a plutôt bien résumé ma pensée.
Note juste qu’encore une fois tu te poses en victime d’un jugement perçu comme discriminatoire sur la seule base de ton sexe de ma part. Alors même que tu me lis probablement suffisamment ici depuis bien assez longtemps pour savoir en y pensant 2 minutes que ce ne peut pas être le fond de ma pensée.
Globalement sur FTS « Je ne prends pas d’initiative en séduction car j’ai peur d’être importun » est souvent une fausse excuse que l’on se sert pour ne pas affronter sa peur du rejet ou de l’échec.
Mon point est le suivant.
Je ne te dis pas que t’es un monstre.
Je dis juste que ta perception des choses me semble fortement biaisée par tes émotions. Et que cela influe logiquement sur ta faculté de jugement et donc tes prises de décision. Donc tes actes.
Je dis également que tu ne sembles pas enclin en ce moment à affronter tes propres erreurs sans te défausser un peu sur autrui.
Bref. Poser ses limites c’est sain. Agir aussi. Interpréter négativement tout ce qui ne va pas dans notre sens c’est enfantin.
Personne n’a jamais dit qu’il fallait forcement choisir entre agir et réfléchir.
Re: L'homme drôle
Posté : 20.06.22
par Nonchalance
J'étais vraiment pris par un train endiablé ces dernières semaines, je n'ai pas eu le temps de répondre jusqu'à aujourd'hui.
Je ne vais pas continuer à essayer de me justifier. J'assume ce que j'ai fait et je referais exactement la même chose dans la même situation que ce soit enfantin ou pas.
Épisode 3: Pas le temps de niaiser
Mes contacts avec Embrouille vont vite se tarir.
Je passe de très bons moments avec Douce. Elle me fait vite comprendre qu'elle veut du sérieux et que j'arrête d'aller voir ailleurs sans pour autant qu'on soit vraiment ensemble. Je pense qu'elle a peur que je fasse n'importe quoi avec ma bite et qu'elle se choppe une saloperie. L'exclusivité sans le couple. Je trouve ça un peu restrictif mais j'en ai déjà marre des deux dernières semaines de "débauche" que je viens de passer et je me sens super bien avec elle. J'ai pas envie de louper le coche pour aller coucher avec des inconnues qui vont disparaitre du jour au lendemain. Alors j'accepte qu'on apprenne à se connaître et passer de bons moments ensemble sans aller chercher ailleurs. Douce est une femme très gentille et très protocolaire. Elle est infirmière mais a fait un burn out et cela fait plusieurs mois qu'elle cherche à récupérer de sa fatigue mentale, elle est suivie par un psy et prends des médicaments pour lutter contre la dépression. Malgré tout, elle ne peut pas s'empêcher d'être présente pour ses amis et ses proches, elle gère l'asso de son club de sport alors qu'elle est sensée être une joueuse avant tout... Douce est trop gentille, mais je l'aime bien.
Entre temps, j'enchaîne les scènes et je ne suis quasiment plus chez moi si ce n'est pour dormir. Oui, parce que c'est chez moi: je paie le loyer, les charges, la bouffe et tout le reste ET j'envoie 500€ tous les mois à mes frères (ou mes cousins dans le contexte culturel français). Avec mon maigre salaire. Je ne dis pas ça pour me vanter, au contraire. Je ne me sens pas du tout chez moi et j'ai la rage alors chaque fois que j'ai fini ma journée de taf, je pars sur les différentes scènes. Heureusement, il y'en a beaucoup qui ont ouvert en ville et il y'en a quasiment tous les jours. Ça ne veut pas dire que je joue tous les jours mais voir ce que font mes collègues humoristes pour s'améliorer, c'est pas plus mal.
Lorsque j'ai fait mon retour, lors de ma première scène alors que j'étais en soirée avec Embrouille et que j'étais sur les nuages, j'ai repris contact avec un gars très sympa. Il est réalisateur, ayant produit une mini série ayant un petit succès et deux ans auparavant, juste avant le COVID, il s'était lancé sur scène pour du stand up. À cause de circonstances difficiles, il avait arrêté et après avoir pris de ses nouvelles et avoir su que ça allait mieux dans sa vie, je l'ai encouragé à reprendre le stand up. Il était hesitant à cette soirée.
Mais une semaine plus tard, je le revoyais sur un plateau de stand up et on a bien accroché. C'est un gars très brillant niveau écriture: il écrit tous les jours professionnellement mais aussi pour son plaisir. Ça fait deux ans que tous les jours, il publie trois à cinq blagues par jour sur Facebook et il est très marrant. Son inspiration principale pour ses blagues c'est son fils, alors je vais l'appeler Papa.
Papa me demande des conseils pour monter sur scène et être à l'aise, je le consulte sur l'écriture de mes vannes. Parfois, il me donne de nouvelles idées et de nouvelles directions, d'autres fois il me donne carrément des vannes.
Je passe beaucoup de soirs sur les plateaux avec Papa à essayer de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas chez les autres artistes. Mon temps est quasi exclusivement consacré au stand up. Malgré tout, je n'arrive pas à nouer d'autres contacts solides avec les autres humoristes. Alors même que je fais de belles scènes et que l'engouement est présent dans le public, j'ai encore du mal à me faire programmer.
J'ai invité Douce aussi à me voir jouer. Je n'ai pas été très bon le soir où elle est venue me voir pour la première fois. Puis j'ai eu une grosse scène type découvertes de talents et je l'ai également invitée. Ça s'est bien mieux passé, j'ai fait le troisième meilleur passage. Mes soirées sont rythmées autour de mes scènes et du temps que je passe avec Douce. Et je commence à être frustré.
Côté scène, le fait de devoir mendier pour jouer me bouffe, j'ai l'impression de ne pas être bon et de ne pas progresser. Alors cette impression est fausse, je ne suis pas assez bon pour être invité sur les plateaux par les organisateurs et je ne connais pas assez les humoristes qui ont des plateaux pour jouer fréquemment. Mais objectivement, je suis dans la moyenne supérieure des humoristes que je vois, de temps en temps, j'arrive même à égaler les meilleurs. Mais pour jouer fréquemment, il faut soit être très bon, soit avoir un très bon réseau. J'ai envie de démarcher des bars pour faire mon propre plateau mais c'est un travail long et complexe.
Avec Douce, je suis frustré sexuellement et émotionnellement. Sexuellement parce que mes problèmes d'érection sont revenus, Douce explore encore sa sexualité et a une petite libido. Quand on couche ensemble, elle est vite rassasiée. J'ai souvent besoin de deux heures ou plus pour être pleinement satisfait de mes rapports.
Émotionnellement parce que je n'ai pas trop de place dans sa vie. Alors que je prends le temps d'organiser ma semaine pour l'inclure dans mon programme, pour qu'on puisse se voir et passer de bons moments, elle est beaucoup plus passive. Malgré tout, je passe de très bons moments avec elle et je ne suis pas pressé d'aller voir ailleurs alors je lui laisse le temps.
Jusqu'au jour où elle m'envoie un message un lundi pour me dire qu'on ne pourra pas se voir toute la semaine parce qu'elle doit organiser l'anniversaire de ses potes et qu'elle héberge une amie chez elle. Ce qui n'est pas très gênant en soi mais j'étais énervée qu'elle ne m'ait pas prévenue avant. Et puis on habite dans la même ville, on aurait pu se trouver un créneau pour se voir ne serait ce qu'une fois, sachant qu'elle ne travaille pas et que je suis assez flexible. Sur le moment je ne dis rien et je décide de lui en parler quand on se revoit, je n'ai pas envie de déclencher une dispute par messages.
La semaine d'après, rebelote, elle me dit qu'elle part en WE en fin de semaine et qu'on ne pourrait se voir que mercredi soir. Sauf que mercredi soir j'ai une scène. Et que le lendemain matin, je me lève à 6h pour aller bosser. Donc je demande à ce qu'on parle parce que c'est une situation qui m'énerve beaucoup. Elle ne s'y attendait pas me dit elle. Moi je veux juste parler, pas mettre fin à notre relation naissante donc je la rassure de ce côté là et on se voit le lendemain à midi pour manger ensemble. Comme quoi, quand on veut, on peut. J'y vais d'un pas serein et je la retrouve, toujours aussi belle et soignée mais aussi... fatiguée. Je lui souris, je l'embrasse légèrement sur les lèvres et je lui demande de ses nouvelles.
"Je suis épuisée en ce moment, j'ai organisé l'anniversaire de mes amis, c'était une galère mais finalement ça s'est très bien passé."
"Cool, tu t'es amusée ?"
"Beaucoup trop, j'étais bourrée... Mes amis ont du prendre soin de moi, j'ai honte!"
On est allé s'installer à un café. J'ai pris un chocolat chaud et un cookie. Elle a pris une limonade.
"Je ne vais pas y aller par quatre chemins," ai-je dit "ça va faire un mois et demi qu'on se fréquente et j'ai pas l'impression d'avoir de place dans ta vie. Je prends toujours le soin de t'inclure dans mon programme de la semaine et ce n'est pas ton cas. Tu me préviens toujours au dernier moment et c'est très frustrant. Tu viens de me le faire deux fois d'affilée et j'aimerais que ça change si on doit continuer à se fréquenter..."
Ses yeux se sont humidifiés.
"Je ne m'en suis même pas rendu compte, je suis désolée! "
"Oui, je sais bien que tu ne le fais pas volontairement, c'est pourquoi je t'en parle. Tu penses que tu peux faire un effort?"
Elle prend une inspiration.
"Tout le monde me reproche d'être à l'ouest en ce moment. Mais je ne peux pas faire autrement, je viens à peine de me rendre compte que j'en faisais trop. Je prends du temps pour moi même et j'en ai besoin, je ne peux pas te promettre que je pourrai faire mieux... J'arrive à peine à organiser ma semaine, je ne peux pas savoir quand je suis dispo ou si je le serai..."
Je ne dis rien. Je n'ose pas la regarder parce que je n'ai pas envie d'avoir un rire nerveux mais je ne ressens rien.
"Qu'est ce qu'on fait?" je lui demande.
Elle est sur le point de pleurer.
"C'est à toi de décider, je ne veux pas te retenir dans un arrangement qui ne te conviens pas parce que je ne sais pas quand j'irai mieux. Et je suis désolé, je sais que je suis revenue vers toi et que j'ai pris une place dans ta vie mais je ne voulais pas te mener en bateau..."
"Je sais."
Je la regarde.
"Je ne peux pas continuer comme ça. Je ne pensais pas qu'on allait se quitter aujourd'hui quand je t'ai demandé de venir parler mais je ne peux pas être avec quelqu'un dans la même ville et ne pas savoir quand je la verrai ou si la personne est disposée à me voir..."
Elle pleure un peu. Je me lève et la prends dans mes bras.
"Je suis désolé." elle me dit encore.
"Ce n'est rien. Prends soin de toi Douce."
Je l'embrasse sur le front et je m'en vais sans me retourner. Je ne ressens rien. Ni joie, ni tristesse, ni quelconque sentiment... Je n'ai jamais eu le temps de m'attacher à elle, elle ne m'a pas laissé grand chose auquel m'accrocher. Mais je suis étonné d'être aussi... vide.
C'était un mardi du début du mois de mai. Le samedi de la même semaine, je faisais une nouvelle rencontre avec la plus belle femme que j'ai pu rencontrer jusqu'à aujourd'hui. Mais je vous raconterai ça et mes autres aventures au prochain épisode.