Voilà, j'ai enfin eu le temps d'écrire un résumé de mon histoire perso et de mes questionnements, puisque c'était la visée de ce post.
D'abord petite réponse à vos remarques:
Outkast a écrit :Le fait que tu sois blasée mais que ça te pose problème montre que c'est pas un état très naturel ou alors que ça le serait mais que tu te mets une pression parce que tu es décalée par rapport à un modèle observé.
Peut-être que tu te sens décalée comme tu penses peut-être que ta mère l'est.
Le fait que tu sois blasée est peut être ton fonctionnement normal car tu as besoin de quelqu'un qui reste dans la séduction et se coule pas dans la routine et le fait que tu sois mal à l'aise le vrai problème?
Effectivement, je prends juste conscience d'un décalage avec, disons... la “norme“ (si tant est qu'il y en ait une). Je ne me mets pas la pression par contre, honnêtement la perspective de vivre comme ça toute ma vie ne me pose pas vraiment de problème. J'aimerais juste identifier de quoi ça vient pour savoir si ce à quoi je dois m'attendre et donc prendre des mesures pour “protéger“ les gens ou si je dois laisser faire le temps et me laisser grandir.
Pour la deuxième partie, je ne sais pas ça sonne faux à mes oreilles. Je n'ai besoin de rien, je ne recherche pas de schéma particulier ou de “type“ de personnes en particulier. J'ai juste besoin d'être émerveillée et portée par quelque chose de grand, et ça n'arrive jamais, du coup je me dis que c'est un idéal dans ma tête mais qui n'existe pas, et j'imagine que c'est lui qui est en faute quand je ressens que je m'ennuie.
J'ai réussi à régler beaucoup de choses grâce à la philosophie et à l'auto analyse et c'est pourquoi je crois que la mise en lumière fonctionne pour tout ce qui relève du mal être.
En revanche, je suis également d'accord pour dire qu'il y a certaines choses qui sont trop profondément ancrées en nous pour pouvoir les résoudre juste par la pensée. Dans ces cas là, l'action, plus que la réflexion, est nécessaire.
Je rejoins Mr.Smooth, dans ces cas là, la pensée ne pèse rien et ne suffit pas à elle-même pour changer certains comportements, pensées profonds. C'est ce à quoi tendent les thérapies comportementales si je ne me trompe pas.
Oui. D'un côté, on ne peut agir sur un problème que lorsqu'on en a pris conscience... Je pense que les deux sont indissociables. À noter quand même que la mise en lumière d'un mal fait souvent beaucoup de bien, même s'il n'est pas encore réglé, en nous donnant un sentiment de maîtrise de soi et donc de possibilité d'action.
Donc.
Ruptures émotionnelles, empreintes cognitives, prises de conscience, psychanalyses personnelles, révélations, émancipation, progression, stagnation, nouveaux décalages.
Répétition de ce schéma depuis mes 16 ans, même si j'ai le sentiment aujourd'hui que mon évolution est beaucoup plus stable, je suis beaucoup plus dans l'action que dans la soumission et c'est tant mieux, ça fait clairement la différence.
Bon. Je vais essayer de la faire courte, pas envie de vous ennuyer.
J'ai eu une enfance heureuse.
Mes parents ont divorcé avant même que j'aie mes premières dents, autrement dit je ne m'en souviens pas et ça n'a jamais été une source de problème ou de tristesse pour moi.
À peu près à cette même époque dont je ne me souviens pas, ma maman s'est mise en couple avec l'homme qui est devenu presque « le » papa à la maison. Un homme beaucoup plus jeune qu'elle, dynamique, punk, rigolo... mais autoritaire.
J'ai une enfance pleine d'amour, d'attention et de soutien. Très douée à l'école, je n'ai jamais de problèmes avec mes parents ou avec l'autorité. Les profs ne savent plus quoi me donner, je suis très/trop rapide et je finis tout trop vite. Je suis très sociable, mon caractère ouvert et mon charisme m'offrent plein d'amis. Déjà alors, j'ai l'impression que tout m'est ouvert, je ne connais ni la difficulté, ni les obstacles.
Au lycée, j'entre dans une voie artistique. Je suis douée de mes mains mais je n'ai pas un don particulier. Je me situe toujours plus ou moins à la moyenne, j'ai de bonnes idées mais je ne me donne pas les moyens d'être meilleure.
J'ai presque 16 ans lorsque mon foyer se déchire. Le copain de ma mère nous quitte, du jour au lendemain, et ma mère tombe dans une dépression violente.
Je ne vais pas tout détailler ici, même si c'est important ce serait ennuyeux pour vous, mais en gros je me suis retrouvée plus seule que jamais, dans une maison vide, avec personne pour s'occuper de moi et partager ma tristesse (une mère fantôme, et une soeur partie pour ses études ou avec ses copains). Avec du recul, je pense pouvoir dire sans trop me tromper que j'ai également fait une petite dépression moi-même (avec tout ce que cela implique, pensées suicidaires, perte de confiance en soi, perte de contrôle, pleurs à n'en plus finir, hygiène de vie déplorable etc.), et je n'ai pas eu de pensées positives pendant bien trois ans. C'est très peu représentatif de l'enfer que j'ai vécu, mais c'est ce qu'il s'est passé factuellement.
Pendant cette période, j'ai tout de même eu des moments de joie, vécu mes premières expériences sexuelles et essayé de me frotter à l'amour, mais rien ne semblait me combler. Je recherchais désespérément l'amour et l'attention que j'avais perdus brutalement dans les bras des hommes, mais rien ne réussissait à me satisfaire, et j'ai perdu plus que j'ai gagné ; chaque échec blessait profondément mon amour-propre.
J'ai fini par aller mieux, mais ça a pris énormément de temps, et ça a indéniablement laissé des marques. Quand je suis partie à l'étranger et que j'ai commencé l'université, j'ai pu prendre la distance nécessaire avec ce qui me faisait tant de mal, loin de ma "famille", et j'ai pu me reconstruire lentement, dans un environnement neuf et sain. Dans un premier temps, je suis devenue extrêmement dure, et je ressentais beaucoup de colère pour tous les gens qui n'avaient pas fait attention à moi, ma mère en première position. Je lui en ai beaucoup voulu, longtemps, de m'avoir fait tout ce mal. Même si je savais qu'elle n'y pouvait rien, j'avais besoin d'être fâchée contre quelqu'un, quelque chose, et d'une certaine manière, j'avais le droit d'en vouloir à la vie. Ca a en tout cas été déclencheur de ma rémission. Et grâce à elle, j'ai retrouvé le sens de la parole, j'ai repris confiance en moi et j'ai commencé à exprimer mes désaccords, j'ai commencé à me défendre verbalement, lorsque mes intérêts étaient menacés. C'est la colère qui m'a fait me sentir vivante et j'ai pu devenir quelqu'un, en qui j'avais confiance, et à qui j'accordais du respect.
Aujourd'hui, je suis bien dans ma vie, dans ma tête, dans mon corps. Je choisis mon environnement, même si je m'adapte plus ou moins à n'importe quel milieu et situation, et je n'attends plus l'avis de mes parents ou de mes proches. J'ai retrouvé une relation toute douce et affectueuse avec ma maman (et le reste du monde), mais nos rôles sont bien définis. Je ne suis plus "son enfant", elle n'est plus vraiment ce que je considérerais "ma maman". Elle est elle, un être humain magnifique qui m'a accompagnée et qui m'accompagne, et j'ai du plaisir à la rendre heureuse.
Mais une barrière émotionnelle est clairement érigée dans mon esprit, et comme beaucoup ici, je n'ai pas d'attachement particulier. Si je ne dois plus revoir ma famille du jour au lendemain, je crois honnêtement que ça ne me ferait ni chaud ni froid. Je peux rester des mois loin d'eux sans qu'ils me manquent ou sans avoir de leurs nouvelles. Ca m'est égal.
J'ai développé un certain calme et une sérénité par rapport aux événements de la vie. Je me connais et je sais que plus grand chose ne peut m'atteindre, même si j'ai conscience que mon esprit y travaille activement.
J'ai le sentiment que cette rupture émotionnelle est en partie responsable de ma vision actuelle de la famille, de l'amour, du couple.
Même si on a vécu longtemps comme une petite famille presque normale, avec un "papa" et une maman, dès que tout a volé en éclats, je me suis rendue compte, en dehors du premier choc occasionné, que la seule personne a avoir toujours été au centre de mon amour était ma mère ; je n'étais même pas triste qu'
IL parte, il ne m'a même pas manqué une seule seconde. J'ai toujours été très affectueuse et expressive avec ma mère quand j'étais enfant, et elle me le rendait bien. En revanche, j'étais beaucoup plus réservée avec les autres personnes. Les démonstrations d'amour n'avaient pas la même légitimité, étaient moins évidentes.
Donc:
- Je crois que je peux dire sans trop me tromper que ma mère a été le seul amour de ma vie. Souvent, aujourd'hui, les gens me disent « c'est évident, tu te fermes à l'amour parce que tu ne veux plus souffrir et tu ne veux plus t'exposer à la douleur de la perte » mais au fond de moi j'ai l'impression qu'il n'y a pas que ça. J'ai l'impression que l'amour inconditionnel et si fort que ma mère m'a toujours porté a laissé en moi une marque sensorielle indélébile. Ca ne devrait pas être comparable avec l'amour, mais les émotions font pas toujours tout comme il faut.
- Concernant ma vision des hommes, je ne sais pas, ils n'ont jamais été des modèles pour moi, dans ma famille j'entends. En dehors de mon papa, de son frère qui s'est suicidé et de son autre frère autiste, il n'y a jamais eu aucune figure masculine dans ma famille. J'ai jamais connu mes grands-pères, je n'ai qu'une grand-mère, encore une femme admirable et « solitaire ». Le seul modèle que j'ai toujours eu devant les yeux, ce sont des femmes à la tête de la famille. Peut-être que c'est complètement anodin et inutile, mais je sais pas, peut-être qu'inconsciemment ça m'a affectée.
- Sinon je n'aime pas la famille, c'est des inconnus pour moi, et c'est limite une corvée d'aller à des repas de famille. On est pas une grande famille pourtant, à peine 10 sans compter les copains-copines de chacun, je parle pas d'arrière-grand-tante ou de cousin du 6e degré. J'aime pas le principe de famille, l'idée qu'on a une certaine dépendance à elle, qu'on lui doit la reconnaissance et le respect alors qu'elle est majoritairement composée de gens inconnus qu'on apprécie pas forcément. J'ai pas envie de me tourner vers eux, et en même temps, si je leur tourne le dos ou que je fais quelque chose d'a-familial, j'imagine que ça fera jaser.
J'aime pas trop le concept.
Tous ces éléments expliquent probablement en partie mon avis sur le sujet de la maternité et la non-envie de fonder une famille (cf. Post sur la maternité/paternité), je pense que c'est assez clair. J'ai plus envie de me prendre la tête avec des gens, de ramasser alors que j'ai rien demandé et que je me débrouille très bien toute seule. J'ai pas envie de reproduire des schémas douloureux sur de pauvres enfants. Personne devrait jamais vivre ça.
Côté amoureux, ça se complique et c'est bien moins clair dans ma petite tête:
- Je n'ai jamais eu de copain et n'en ai jamais ressenti le besoin. J'ai cru à l'amour certes quand j'avais 16 ans, et j'ai eu 2-3 histoires qui ont fait battre mon coeur d'adolescente, mais même alors, quand rien de tout cela ne m'était encore arrivé, je ressentais un vide. J'ai largué 3 petits copains de suite pour la même raison : « désolée tout se passe bien entre nous mais j'ai pas l'impression que c'est de l'amour. » Je n'arrive pas à faire la part des choses, je n'arrive pas à m'imposer de rester avec un gentil garçon qui me traite bien et qui a l'air de m'aimer sincèrement. Je m'ennuie profondément, et je préfère lire les belles histoires dans les livres. J'ai toujours été mal à l'aise avec les couples, j'ai jamais ressenti un truc transcendant, du coup j'étais mal à l'aise au moindre doute. Alors : idéalisation d'un amour jamais atteint ? Grosse grosse fixette sur l'idéal ? Ou simplement trop impatiente ?
- Aujourd'hui, j'ai pris mon mal en patience et je ne suis pas pressée, j'adore ma solitude et j'ai une vie très remplie qui, objectivement, ne laisserait pas de place à un amoureux. Mais concrètement, je n'en ai ni l'envie ni le besoin. L'amour c'est une énigme pour moi. Quand je suis dans des concerts, dans des bars, dans la nature, j'observe les couples qui se bécotent et qui se serrent dans leurs bras, et ça m'oppresse. Je n'ai jamais ressenti l'envie spontanée de caresser un homme, de lui montrer de l'affection. Ca m'arrive dans un contexte intime, et c'est une façon de dire merci pour le moment passé, c'est l'expression d'une satisfaction des corps et des esprits, mais ça ne va pas plus loin. Je n'éprouve pas pour autant de l'amour pour lui au quotidien.
- Je fais des rencontres, sans le vouloir, sans le chercher... Je n'ai rien à offrir, et les hommes ne m'ont jamais autant désirée que maintenant, alors que je suis on ne peut plus désintéressée et je m'en-foutiste. J'ai tellement enchaîné les rencontres que j'ai perdu le sens de la séduction, presque blasée. Je ne sais plus reconnaître la vraie attraction et juste l'excitation sexuelle.
Rien de bien grave. Je respire un grand coup et je me recentre. Mais mes rencontres, même sympa, finissent invariablement par me lasser, après de moins en moins de temps. Alors que parfois c'était bien parti. Je trouve les gens ternes, je trouve qu'ils ne se donnent pas de peine, manquent de passion. Est-ce que je me donne de la peine, moi ? Probablement pas, et c'est peut-être dans cette attitude que j'envoie de faux messages. Mon excuse est que je ne cherche pas ouvertement. Je suis plutôt partisane du « foutez-moi la paix ». Mais j'ai beaucoup trop de peine à résister à une caresse à 1h du matin. Mais ce n'est qu'un pis-aller, et je dois me rendre à l'évidence : les hommes que je rencontre ne m'intéressent pas. Du moins les rencontres qui dépassent le stade du flirt. Ca m'ennuie. Je ne comprends pas.
- Ma vision du couple actuelle, s'il en est une, rejoint celle de certains membres ici. Je n'ai pas besoin de justification ni d'officialisation, en fait, plus c'est intime et plus ça me convient. Je recherche une forme de simplicité et d'évidence, et si possible de l'émerveillement à l'infini. J'ai lu cette phrase dernièrement sur le journal d'un membre et je m'y suis retrouvée : « quand on est ensemble on est ensemble, quand on est pas ensemble on n'est pas ensemble ». Voilà. Chacun fait ce qu'il veut de SA vie. Et les moments partagés sont des moments de bonheur simple qui embellissent le reste. Je n'aspire pas au couple, je ne suis même pas certaine d'être capable d'arriver à vivre avec quelqu'un et de subir ses moments de colère, ses frustrations ou ses angoisses. Bien trop peu de gens sont capables de s'auto-analyser et d'épargner les autres de leurs accès de colère, et je refuse de subir ça. Je prends la tête à personne, j'ai pas envie que quelqu'un me prenne la tête. J'ai pas envie que quelqu'un puisse avoir le droit de bonheur et de malheur sur ma vie, ça m'appartient.
- Je lis cette description, je la trouve mécanique, calculée, on dirait un mode d'emploi avec des règles et des prescriptions. Je trouve ça triste. Mais j'ai l'impression que c'est la seule forme d'amour que je pourrais jamais approcher de près.
=> Beaucoup de personnes me disent qu'assez clairement, c'est à cause de ce qu'il m'est arrivé que je me ferme complètement à l'amour, que ce soit pour le "donner" ou le "recevoir", et que ça finira par passer. Je ne sais pas pourquoi mais je n'y crois pas trop. Le fait que déjà avant cette histoire, je n'ai pas réussi à être transcendée par mes petites histoires comme les adolescents normaux, je me dis que ça doit être ancré en moi depuis plus longtemps. Idem pour la théorie de la peur. Au contraire, j'ai l'impression qu'on pourra plus jamais me faire aussi mal.
Ma rupture émotionnelle est-elle à l'origine de mon comportement, de mes blocages et décalage actuels? Ou est-ce juste moi qui ai toujours été ainsi?
Voilà, c'était la psychanalyse personnelle d'une handicapée des sentiments.
C'était de ce type « d'influences du passé » dont je voulais parler dans ce post. Je me demande jusqu'où la génétique a des limites sur notre développement avant de laisser sa place aux événements et aux empreintes qu'ils laissent. Je suis vraiment pas abilitée à répondre à cette question, mais la simple discussion est intéressante. Surtout, si je pouvais savoir si je n'agis que par mimétisme ou en réponse à un choc, je pourrais alors travailler sur moi pour m'en défaire et évoluer vers mes vrais ressentis et besoins…?
Ah oui je tiens aussi à ajouter que ces questionnements ne me rendent pas malade, ça fait longtemps que j'y pense parce qu'ils sont engendrés par de nombreuses situations qui ponctuent mon quotidien. Je le déballe ici parce que c'était à-propos, c'est ce que m'a inspiré le récit d'Owen et j'avoue que vous le confier a sa part d'intérêt, j'espère qu'elle en aura pour vous aussi. Mais je ne psychote pas à fond, je livre beaucoup d'infos ici mais elles ne débordent pas de ma tête en ce moment, pas de débordement ou de panique, rien d'anormal.