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Q : La première question qui me vient à l'esprit est : pourquoi gardez-vous le silence... et pourquoi le rompez-vous parfois.
HP : Tout le monde le sait, au moins intuitivement, le silence est la seule bonne façon de faire les choses qui comptent. On se tait pour bien apprendre, pour bien travailler, et par pudeur. Car progresser et évoluer, c'est en définitive une aventure personnelle dans notre 'jardin secret". Parler à ce stade prouve une immaturité manifeste. Récemment j'ai lu une interview d'un ancien Directeur de la C.I.A. américaine, un administratif, qui disait que tous les "espions" étaient des perturbés mentaux immatures, qui ratent leur vie privée et auraient tout raté s'ils n'avaient pas trouvé cette façon de gagner leur vie. Sans qu'il soit nécessaire de nommer personne, tu as dû remarquer que ceux qui parlent ou écrivent le plus sont relativement médiocres, tant en Art Martial que dans la vie, et toujours dénigrent la compétition ou le combat réel... ou le terrain. Parce qu'ils n'ont jamais remporté le moindre combat dans un "moment de Vérité"... comme dirait "Karaté Kid"
Le silence est la seule voie qui permet d’accéder à nos différents niveaux de conscience. Il faut un certain silence, qui est en réalité une qualité de présence silencieuse, être simplement à l’écoute, pour entendre nos différentes « voix intérieures », et ainsi entrer en contact avec les ressources qu’elle rèvélent.
Henry Plée fustige ceux qui ne font QUE parler ou écrire ; il a lui-même beaucoup parlé et écrit pour enseigner…
D’ailleurs, passer son temps à la fermer ne rime à rien non plus, l’essentiel c’est de rechercher ces « moments de vérité », lorsqu’on est seul et à poil face à soi-même.
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Q : Je vois que nous retrouvons le franc-parler de Maître Plée...
HP : Je sais que beaucoup de pratiquants aiment que l'on dise pour eux des vérités qu'ils n'osent pas exprimer. Ce n'est pas qu'ils n'osent pas, ils ne peuvent pas. Moi, mon grand âge - que je ne ressens pas - mes grades et ma réussite, font que je n'ai à ménager personne et que je peux me permettre d'être honnête. Quand on commence à "avoir évolué", ce qui d'ailleurs peut n'être qu'un sentiment parfaitement subjectif, on est saisi par la difficulté d'en rendre compte, voire l'inutilité de parler de son parcours.
Certaines de ces « voix intérieures » sont socialement réprimées, et les exprimer est condamné. En outre certaines sont impossibles à verbaliser, à mettre en mots… Elles ne peuvent qu’être mises en acte. En ayant appris à les réprimer, nous avons formé notre Surmoi et ainsi notre personnalité, du grec « persona » : le masque que portaient les acteurs de théâtre dans l’antiquité.
Notre personnalité est ce masque que nous avons formé pour jouer notre rôle social. Certains ont un masque de battant, d’autres de nouille, ou de PUA, et d’AFC…
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Q : Oui, ce sera ma seconde question, qu'est-ce qui, dans votre parcours, peut être un enseignement pour les jeunes pratiquants?
HP : Les jeunes seulement ? Ce n'est pas gentil pour les moins jeunes, tu les considères comme des cas sans espoir ? Revenons au parcours. Chacun a ou aura plus ou moins le sien, comme chacun a ou aura plus ou moins son propre style dans l'Art Martial de son choix, puisque s'identifier totalement à un Maître est la preuve d'un manque de créativité. Faire des copies parfaites de la Joconde du Maître Léonard de Vinci n'est pas une preuve de talent, tous les appareils de photo le font, et mieux. Il y a de nombreuses "Histoires de Sagesse", que j'adore, tournant autour de cela. Tu en connais certainement. Leur intérêt, par rapport aux Fables, avec morale finale, est qu'elles sont drôles et touchent en profondeur des domaines autres que celui de l'intellect. Précisément le domaine que cherchent à toucher tous les vrais Arts Martiaux. Et chacun sait que l'intellect, la raison, la machine à penser, est le pire obstacle à l'efficacité, tant en défense qu'en "attaque-légitime-défense". Tous les instructeurs, à tous les niveaux, éprouvent le dilemme de parler "pour partager" leur émerveillement ou de se taire sur leurs découvertes tant qu’elles n'ont pas été maîtrisées. En outre il y a des choses qu'il vaut mieux ne pas dire pour laisser une chance aux gens de les découvrir tout seul, et ainsi de pouvoir réellement les appliquer.
Le parallèle entre le Maître et le PUA me semble assez parlant…
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Q : Vous pensez que l'on ne peut réellement appliquer une technique que si on l'a redécouverte soi-même ?
HP: Voilà une bonne question. Mais expliquer pourquoi demanderait plusieurs revues. Je vais essayer d'être bref. Cela va paraître scientifique mais il faut y passer. Tout peut changer dans votre compréhension des Arts Martiaux si vous comprenez que l'on n'a pas 'un" cerveau, comme tout le monde le pense, mais trois cerveaux, ou si vous préférez un cerveau "triunique". Ils viennent des aléas de notre parcours évolutif depuis l'apparition de la vie animale en mer puis sur terre, il y a 400 millions d'années.
C’est l’une des métaphores issues de l’évopsy, enfin ici ce serait plutôt de "l’évoneuropsy". Cette métaphore des trois cerveaux s’appuie sur le fait qu’à chaque étape de l’évolution une nouvelle couche cérébrale apparaît, chaque fois plus complexe.
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Q : Quels sont ces trois cerveaux et leur intérêt sur le plan martial?
HP : Le premier apparu et qui existe encore dans notre crâne est le cerveau reptilien, et si tu préfères un nom scientifique : le paleo-cortex. Il a en charge notre survie, ne "parle" pas, et bien que petit il contient les "glandes" les plus vitales : hippocampe, amygdale, septum etc... Lorsque 1’on est attaqué avec menace de mort nous fonctionnons uniquement sur ce cerveau reptilien. Il concerne donc les Arts Martiaux de combat à mort, guerriers, Si je peux me permettre ce plée-onasme. Le second cerveau est le "mammifère", qui est au-dessus et autour du reptilien, scientifiquement c'est le cortex, ou cerveau "emotif" parce que s'y trouvent les émotions, la peur, et les Rituels animaux, qui comprennent les affrontements destinés à sélectionner les meilleurs reproducteurs. Lui aussi est silencieux. Les Arts Martiaux sportifs, conventionnels, en dépendent. Le troisième cerveau, le plus gros mais dont on n'emploie que 5 à 10% est le "cerveau moderne", neo-cortex dit aussi "supérieur" par suite de sa position et de ses possibilités, il parle, il lit, il raisonne, il est conscient et cela fait aussi de lui le roi des conneries, à cause de l'ego. Au point de vue vitesse d'exécution le plus rapide est le reptîlien, le mammifère est trois fois plus lent et le supérieur est dix fois plus lent que le mammifère, c'est à dire trente fois plus lent que le cerveau de survie, le reptilien. Tu comprends mieux, je pense, pourquoi l'enseignement martial de base est "le vide mental" ou le "non mental", ce qui permet au reptilien et éventuellement au mammifère de s'exprimer sans être ralentis par le cerveau "intelligent".
La différence de vitesse de traitement de l’information est due à l’augmentation de la complexité, et donc au nombre de connexions qui fonctionnent comme des nœuds, ralentissant la transmission. De plus chaque niveau charrie davantage de données contradictoires qu’il s’agit de résoudre pour pouvoir prendre une option (choisir, décidér, régler un problème, agir.)
La notion de rituel est importante, elle vient de l'éthologie (littéralement "science du comportement", essentiellement le comportement animal) et toutes les situations que l'on rencontre, de la décision d'opener jusqu'au Fclose peuvent être décrites en terme de rituels.
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Q : Je vois mieux l'intérêt de la connaissance de ces trois cerveaux sur le plan martial, mais si l'on s'arrête à la notion traditionnelle du "vide mental" en combat et de "silence" au Dojo, cela peut suffire.
HP: Tu n'as pas vraiment tort mais en sachant très bien comment ils fonctionnent on peut éviter des erreurs pédagogiques. IJ n'y a pas de professeur à 1 'Ecole ou au Dojo qui ne pense pas enseigner son art avec une pédagogie tout à fait intelligente. L'ennui c'est que c'est rarement le cas et surtout au Dojo. Mais, même avec un enseignement anti-pédagogique sur le plan martial, on peut arriver à se préserver Si l'on sait comment les choses se font dans notre tête.
La question se pose de manière récurrente sur FTS quant à la transmission des qualités d’un PUA. Ce n’est pas parce qu’il fait très correctement ce qu’il fait qu’il est en mesure de le transmettre, en effet. Mais la compréhension du fonctionnement de notre cerveau « trois en un » peut nous permettre de comprendre pourquoi, et plus intéressant encore, de retrouver comment et pourquoi ce que fait un PUA fonctionne.
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Q : C’est-à-dire?
HP : J'ai dit que les cerveaux reptilien et mammifère étaient silencieux et le supérieur parlait, donc raisonnait. En pratique tout "monte" du cerveau reptilien vers le mammifère puis le supérieur, ou du mammifère au supérieur, et jamais, je dis bien jamais, du supérieur vers le mammifère et le reptilien. Par exemple, si on vous insulte, si on vous humilie ou si on vous menace, c'est votre reptilien qui le reçoit comme une agression et sa réaction est toujours de fuir ou de tuer. D'ailleurs on dit 'le vais le tuer ce mec" sans le penser au niveau neocortex supérieur. Du reptilien la réaction monte au mammifère, centre des émotions, et cette pulsion de survie y est amplifiée ou freinée par la peur, la pitié, l'amour etc... La colère émotive augmente le désir de vengeance et de haine. mais s'intègre dans le cadre du Rituel où la loi, pour toutes les espèces, est "tu ne tueras pas un individu de la même espèce". Du reptilien l'influx nerveux est passé au mammifère qui le passe à son tour au neocortex qui va insulter - un rituel de provocation et d'intimidation mélangé - et réfléchir, soit à une stratégie de défense ou d'attaque, soit considérer les conséquences du passage à l'acte. Le comportement final sera le résultat des connexions reptilien-mammifère-supérieur, variable selon les individus.
En résumé :
reptilien = instinctuel,
mammifère = émotionnel,
humain/supérieur = intellectuel.
Chacun a son mode d’expression ! Le cerveau reptilien les forces instinctuelles de vie et de mort (impulsion de tuer ou de se reproduire), le mammifère les 5 émotions de base, et le supérieur utilise le langage. Mais à celui qui sait faire silence (calmer l’agitation des pensées verbales dans son esprit) et ainsi entendre ces « voix intérieures » sera ouvert les voies intérieures de ses ressources plus profondes, permettant de laisser s’exprimer ses énergies bloquées jusque là par la bienséance apprise par notre si supérieur cerveau « bien pensant ».
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Q: C'est ce qui se passe en combat?
HP : Oui. En Championnat on en reste généralement au mammifère pur, avec des montées mammifère-supérieur, mais ceux qui gagnent sont ceux qui se placent plus ou moins au niveau reptilien "tueur". Ce sont les plus agressifs qui gagnent, surtout dans les disciplines dites de "la main", Karaté et similaires, moins dans le Judo et les luttes similaires, comme le Sambo ou la lutte bretonne, car la lutte est le rituel de base de l'animal-homme. Mais en vrai combat de survie tout se passe au niveau du cerveau reptilien, et ce n'est qu'après que le cerveau mammifère reçoit l'influx. Tous ceux qui ont été menacés dans leur vie ont réagis au niveau reptilien, puis lorsque le danger est passé le cerveau mammifère s'est manifesté la sueur est venue, le cœur s'est emballé, et les jambes ont tremblé. Intéressant non ?
Comme l’auront compris les plus futés^^, la sarge est exactement comme un championnat. Celui qui en reste à son cerveau mammifère, en étouffant au lieu de la surfer l’énergie brute du reptilien, a tout de l’AFC, du gentil garçon bien socialisé… La sueur vient, le cœur s’emballe, les jambes tremblent…Le reptilien n’est même pas transgressif, il ignore même la notion de norme sociale ! Apprendre à le laisser s’exprimer sous contrôle du cerveau supérieur est la clé de l’action déterminée et efficace. Au passage, les forces instinctuelles du reptilien prennent la couleur émotionnelle du mammifère. Ainsi on peut combattre sans pitié mais avec compassion ; on peut sarger pour baiser mais avec émotion.
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Q : Oui, mais où est l'intérêt dans l'enseignement?
HP : Je ne voudrais pas trop perturber mais il me semble que ce doit être dit. Aux époques héroïques, en Asie mais aussi en France, lorsque j'étais pionnier, et aux USA où également vers les années 1949 mon ami Trias était pionnier du Karaté, lorsqu'un débutant arrivait au Dojo on lui demandait d'attaquer les Ceintures Noires comme il le voulait, puis ces Ceintures Noire bloquaient, se défendaient, mais sans attaquer. Ce 'baptême" était passionnant, les Ceintures Noires remettaient les pieds au sol et avaient souvent des surprises instructives, les débutants avaient confiance dans le Dojo. A la fin de chaque cours, le "Maître" prenait en ligne, l'un après l'autre, tous les membres du Dojo et les battait ou était parfois battu, mais dans ce cas il conservait son prestige... et l'entraînement suivant le membre qui avait battu le professeur avait intérêt à faire attention. C'était viril. C'était martial. Je doute que certains professeurs le fassent, même après avoir lu ces lignes.
Ne serait-ce pas ce qui manque au sein de la communauté aujourd’hui ? N’y a-t-il pas une sorte de bienséance ? Il y a les puas, les certifiés, les aspirants-players, les nouveaux… et c’est très bien d’ailleurs. Mais les anciens pleurent la spontanéité du début, n’y a-t-il pas un manque d’énergie quelque part ? Les « jeunes » qui vont sarger avec des « anciens » n’ont-ils pas trop de déférence, d’idéalisation… ? On est entre couilles et on y va quoi !
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Q : Je ne vois pas le rapport avec les trois cerveaux...
HP : Tu vois pourquoi il vaut mieux se taire. Il y a trop d'enseignements de base à expliquer, d'erreurs à rectifier, on a l'impression de verser de l'eau dans une cruche trouée. Bon. On continue quand même. Ces baptêmes de débutants et l'affirmation de la supériorité du professeur à la fin de chaque entraînement peut paraître rustique à ceux qui sont incapables de le faire, mais par cette "rusticité" on en restait au niveau du cerveau mammifère, avec parfois du reptilien, jamais au niveau cerveau supérieur. C'était donc du véritable Art Martial. Note qu'en Judo on faisait de même, les anciens du Sommerard en parlaient encore il y a quelques mois dans un repas d'anciens, à la fois bien sympathique et bien pénible. Certains avaient évolué vers le haut, drôles, sereins, de vrais sages, et d'autres avaient évolué vers l'amertume, étaient acerbes, avaient une sorte de mépris pour les jeunes pratiquants, qui n'ont rien d'inférieur aux anciens. Mais passons.
Je n’ai de leçon à donner à personne, je ne me le permettrai pas, mais si ce passage rappelle quelque chose à quelques uns… voyez si ça vous sert.
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Q : Comment devrait-on enseigner, selon vous?
HP: Pas selon moi... le vrai enseignement est connu. Il y a des fois où je me demande s'il n'y a pas mystification dans le sens "Pourquoi faire vite lorsque l'on peut faire lentement". Car en périodes d'enseignements accélérés, comme en temps de guerre, la formation de jeunes samuraï pour aller au champ de bataille par exemple, en un an on faisait progresser l'individu comme on le fait maintenant en cinq ou dix ans.
"Pourquoi faire vite lorsque l'on peut faire lentement" = tous les bons players ici le disent et le redisent, la sarge s’apprend sur le terrain. Aucun mot, aucune phrase, aucune verbalisation ne pourra jamais réveiller le serpent endormi… pardon, je voulais dire « le reptilien refoulé », on ne va pas attaquer tout de suite les images ésotériques ^^
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Q : Pourquoi?
HP : Parce qu'on inverse les choses. Je t'ai parlé des trois cerveaux. Tu as compris que l'action a sa source dans le cerveau reptilien, pour la survie, ou le cerveau mammifère, pour le Rituel, pour aboutir dans le cerveau supérieur, éventuellement car ce n'est pas nécessaire. C'est même plus nuisible qu'utile. Comme les Arts Martiaux de Dojo avec "Do" sont conventionnels et opposent un individu contre un individu, on est donc en Rituel. Dans l'enseignement "traditionnel" en fait faussement traditionnel - on commence par expliquer à notre cerveau "supérieur" ce que le cerveau "mammifère" ou "reptilien" doit faire. On "comprend" mais on ne peut pas "faire" parce que le cerveau "supérieur", intelligent, qui raisonne, ne peut absolument pas donner d'ordres ni d'indications aux cerveaux du dessous qui, eux, "font". Le cerveau supérieur peut, avec de l'entraînement, ne pas tenir compte des messages de peur, d'inquiétude, d'émotion, de recherche de plaisir (des 5 sens + sexe), envoyés par le cerveau mammifère et même par le reptilien, mais il ne peut rien leur "enseigner". Autrement dit, enseigner en expliquant en premier c'est, à coup sûr, ralentir la progression. Après chaque explication, le pratiquant essaie de répéter le mouvement, mais pour l'application il doit sentir et trouver l'opportunité. Autrement dit il doit oublier ce qu'il a appris "intellectuellement". En fait c'est en regardant les plus avancés et en subissant lui même qu'il apprend. Cette dualité retarde les progrès. L'idéal serait de montrer sans expliquer - ça le cerveau mammifère comprend - puis d'exécuter et de faire exécuter tout de suite en assauts, kumités ou randoris. Il y aurait des "fautes" selon le dogme ou le "canon" de la Discipline ou du Style mais il y aurait du vécu, c'est à dire des expériences répétées dans le temps. Et seul le vécu est engrangé dans la mémoire à long terme. Or, on le sait rarement, la mémoire à long terme est située dans le cerveau mammifère. La mémoire à moyen terme est dans le cerveau supérieur (c'est ainsi que l'on retient et oublie un numéro de téléphone). Et la mémoire à très court terme est située dans le cerveau reptilien. Quelques minutes à quelques heures après, ce dernier a tout oublié... comme un crocodile ou une tortue de mer qui fonctionnent avec seulement un cerveau reptilien.
Assauts, kumités, randoris = aborder, opener + socialiser, se bagarrer pour le close ^^
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Q : Donc, lorsque l'on nous enseigne des techniques sophistiquée de "self-défense" contre agression à risque mortel, elle concernent le cerveau supérieur et le cerveau reptilien, pour les explications (souvent oubliées immédiatement ou ne laissant qu'un vague souvenir... inutilisable) et les quelques gestes effectués après ? L'ensemble serait donc oublié quelques heures après ?
HP : Tout à fait. Je vois que tu commence à comprendre. Mais, pendant l'entraînement, le pratiquant a l'impression d'apprendre à survivre. Il ne réalise pas qu'après le cours il ne lui restera rien dans les cerveaux qui devraient avoir appris, tout est dans le cerveau "intelligent", une illusion. En fait, on n'apprend jamais vraiment "grand chose". Du moins pas de la façon dont ont l'imagine. Et ce qu'on apprend en Art Martial ne passe pas du tout par l'entendement et la parole. Pas étonnant qu'en cas d'attaque vraie, un Budoka gradé perde tous ses moyens, comme le premier passant venu. S'il n'a pas été mis KO ou n'a pas été tué, la première réaction "reptilienne" passée, il pourra parfois appliquer ses techniques sophistiquées, mais pas en réaction spontanée. C'est impossible. Elles sont trop élaborées pour les cerveaux primitifs. D'ailleurs si ces derniers étaient malléables à nos utopies ce serait un désastre. Notre bagage génétique, "animal" est inchangé depuis l'aube de l’homme et se transmet de génération en génération.
Bien plus que les techniques apprises, ce serait notre capacité de confrontation qui serait déterminante... Apprendre les techniques ne serait qu'un prétexte pour développer cette capacité de confrontation...
Là encore j'ai déjà entendu dire cela trés souvent par de trés bons players !
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Q : On ne va pas entrer dans la métaphysique biologique
HP: Moi je veux bien arrêter tout de suite, mais ce sont des prises de conscience élémentaires...
Hé oui… Autres prises de consciences élémentaires à partir de cette métaphore :
- Le niveau de testostérone produit compte moins que notre capacité à laisser s’exprimer cette testotérone… Inutile de rajouter du carburant si l’injection est bouchée ^^
- Cette notion des trois cerveaux recoupe très exactement les trois états du moi de l’analyse transactionnelle…
- Le patterning, la PNL, ont pour but d’endormir les réactions de défense du reptilien, court-circuiter les pensées du cerveau supérieur et laisser s’épanouir les émotions sexuées du mammifère.
- La timidité, la règle des trois secondes, les croyances limitantes..
- L'inné et l'acquis, l'instinct et l'émotionnel...
Autant de notions qui trouvent dans cette métaphore des trois cerveaux un support utile et pragmatique. Ce que nous verrons trés bientôt, en attendant je répondrai aux questions.

Interview publiée dans la Revue Budo International de Novembre 1995.
directeur de la publication : Alfredo Tucci budo@dimasoft.es
Article en ligne : http://daojia.free.fr/philo/cerveau.htm